Par Luc Michel

# RADIO.KAMERUN#1/ 
LUC MICHEL (EODE-BRUXELLES) : LE BURKINA FASO ROMPT AVEC LA FRANCE !

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2023 03 03

Le Burkina Faso a officiellement renoncé à un accord d’assistance militaire avec Paris et a donné à la France 30 jours pour retirer tout le personnel militaire du pays d’Afrique de l’Ouest.  Les autorités françaises auraient reçu mercredi 1er mars la mise en demeure de la décision.

Plus d’explications avec Luc Michel, géopoliticien (interview pour Press Tvdu 02 03 2023).

FIN DU TRAITE DE 1961 ENTRE LE BURKINA FASO ET LA FRANCE

Le Burkina Faso a officiellement renoncé à un accord d’assistance militaire avec Paris et a donné à la France 30 jours pour retirer tout le personnel militaire du pays d’Afrique de l’Ouest. Les autorités françaises auraient reçu mercredi 1er mars la mise en demeure de la décision.

Une lettre du ministère burkinabé des Affaires étrangères, datée de mardi, informait la France que le Burkina Faso « renonçait à l’accord d’assistance militaire technique conclu à Paris le 24 avril 1961 », selon l’AFP.

Le traité a été conclu quelques mois seulement après que l’ancienne colonie de Haute-Volta a obtenu son indépendance de la France. C’était la base légale de l’intervention militaire française dans le pays contre les terroristes qui terrorisent le Sahel depuis le changement de régime en Libye soutenu par l’OTAN en 2011.

L’Afrique veut se libérer de la politique néocoloniale de la France :

Paris ne peut pas complètement rompre avec son passé « enraciné dans le colonialisme ».

La décision de Ouagadougou intervient quelques jours seulement après que la France a abaissé le drapeau sur sa base militaire près de la capitale et retiré quelque 400 soldats qui avaient été précédemment déployés dans le cadre d’une mission anti-insurrectionnelle.

L’ambassadeur Luc Hallade a été rappelé à Paris pour des consultations à la mi-janvier, après que le Burkina Faso a exigé son départ.

Le Premier ministre burkinabé, Apollinaire Kyelem de Tambela, a déclaré que la Russie était un choix « raisonnable » de nouveau partenaire dans la lutte contre les terroristes. Cela ferait du Burkina Faso la troisième ancienne colonie française en Afrique à montrer la porte à Paris et à se tourner vers Moscou pour obtenir une aide militaire, après le Mali et la République centrafricaine.

Le président français Emmanuel Macron a cherché à décrire le processus comme une « réorganisation » et « pas un retrait » du continent. La France a cherché à avoir une « empreinte réduite » en faveur d’une plus grande présence de « nos partenaires africains », a-t -il déclaré lundi à l’Élysée, avant un voyage en Angola, au Gabon et dans les deux Congo plus tard cette semaine.

QUELS SONT CES FAMEUX ACCORDS SIGNES AVEC LA FRANCE?

Ouagadougou a exigé le départ de tous les soldats français présents au Burkina Faso et dénoncé un accord de coopération militaire avec la France signé en 1961.

C’est la fin d’un accord vieux de plus de soixante ans. Dans un communiqué de presse, le ministère des Affaires étrangères du Burkina Faso exige « le départ définitif de tous les militaires français en poste » au Burkina Faso dans un délai d’un mois. Cet ultimatum ressemble beaucoup à l’exigence de Bamako concernant le départ des soldats de l’opération Sabre. Mais il s’agit en réalité de dénoncer un autre accord, signé entre la France et le Burkina Faso – qui s’appelait alors Haute-Volta – le 24 avril 1961.

Ce jour-là, un « accord d’assistance technique militaire » est signé entre les deux pays, alors que la Haute-Volta a acquis son indépendance un an plus tôt. Le document prévoit la présence de coopérants français dans plusieurs secteurs – défense, sécurité et protection civile – au Burkina Faso. Une sorte de transfert de compétences qui dure depuis six décennies et qui prévoit un soutien financier, matériel et humain à l’armée du pays d’Afrique de l’Ouest.

LA FRANCE A SIGNE PLUSIEURS ACCORDS DE CE TYPE EN AFRIQUE.

Appelés « accords franco-africains de défense et d’assistance technique militaire (AMT) », ils ont été signés au moment de l’indépendance, entre le 22 juin 1960 et le 19 juin 1961 – en 1963 pour le Togo. Ils  » constituent le réseau le plus solide et consacrent sur le terrain la notion, encore très abstraite, de coopération « , écrit le chercheur Camille Evrard. L’enjeu, entre autres, est d’obtenir la signature d’accords de coopération militaire dans la foulée des transferts de compétences, afin de maintenir la structure militaire de l’organisation coloniale tardive transformée en Communauté.

« Dans cette mutation soudaine et précoce qu’a connue la Communauté, l’idée de coopération militaire a remplacé celle de domination de fait qui caractérisait jusqu’alors la position de la France. Le dispositif imaginé pour permettre l’indépendance de l’Afrique tout en conservant des outils d’influence s’appuie sur la loi constitutionnelle du 4 juin 1960, qui prévoit la possibilité pour les États de devenir indépendants tout en signant des accords d’adhésion à la Communauté dite « rénovée », poursuit le chercheur.

L’argument du Burkina Faso s’inscrit dans la continuité du discours adopté au moment de la demande de départ des soldats de l’opération Sabre : le pays veut retrouver sa souveraineté, notamment en matière de sécurité militaire. Ce n’est pas nouveau : dans les années 1960, plusieurs pays avaient révisé leurs accords militaires avec la France pour retrouver leur souveraineté. A l’époque, Paris avait réussi à maintenir des troupes militaires sur le continent « grâce à des bases négociées, souvent laborieusement », rappelle Camille Evrard.

Au Mali et à Madagascar, par exemple, la France a signé un accord militaire en juin 1960 qui, comme l’indique un rapport du Sénat français de l’époque, permet aux forces françaises « de circuler librement sur le territoire malien et malgache ». En août 1960, le même type d’accord est signé avec le Tchad, la République centrafricaine, le Gabon et le Congo-Brazzaville.

Le chercheur français précise toutefois qu' »il faut distinguer les accords de défense, qui fixent les conditions d’intervention des forces françaises sur le sol des États signataires, des accords d’AMT, qui prévoient l’aide nécessaire à la mise en place de leurs armées nationales ». Chaque ancienne colonie française, après son indépendance, a réussi à négocier des accords différents avec Paris.

Mais dans tous les cas, les accords, qu’ils soient de défense ou d’assistance militaire technique, stipulent le « devoir d’entraide des deux pays pour préparer et assurer leur défense », mais aussi la possibilité de « faire appel à la France », avec la signature, dans ce cas, d’accords particuliers. En 2022, après la rupture de ces accords, le Mali considère la présence française comme « illégale » et en violation de la souveraineté malienne. Un an plus tard, le Burkina Faso suit également cette ligne. Il est clair que les accords des années 1960 avaient pour but de rendre aux pays africains concernés leur souveraineté en matière de défense. Mais au fil du temps, ces pays ont perdu leur souveraineté et la France a évidemment profité de la situation pour s’imposer sans jamais demander l’avis des pays hôtes.

La France a toujours agi en Afrique comme si elle était en terre conquise. Mais cette époque est révolue, et les allers-retours du président Macron en Afrique n’y changeront rien.

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