© UNICEF/Mohammed Nateel.
Un enfant souffrant de malnutrition est allongé sur un lit à l’hôpital Patient Society de la ville de Gaza.
Par ONU Info
Source : ONU Info
La bande de Gaza est officiellement frappée par la famine, a annoncé vendredi un groupe d’experts internationaux sur la sécurité alimentaire, appuyés par l’ONU. Près de deux ans après le début d’une guerre brutale durant laquelle Israël n’a eu de cesse d’entraver le ravitaillement de l’enclave palestinienne, au moins un demi-million de personnes sont touchées par le fléau mortel.
Selon une nouvelle analyse de l'IPC, plus d'un demi-million de personnes à Gaza sont prises au piège de la famine.
La famine est confirmée lorsque trois seuils critiques – privation alimentaire extrême, malnutrition aiguë et décès liés à la famine – sont franchis. https://t.co/dAAR3jMSJW
— ONU Info (@ONUinfo) August 22, 2025
C’est la première fois que la famine atteint le Moyen-Orient depuis la création il y a 20 ans du Cadre intégré de classification de la sécurité alimentaire (IPC), une structure basée à Rome, dont les analyses font autorité en matière.
Les conditions de famine sont pour l’heure cantonnées aux environs de la ville de Gaza, dans le nord du territoire. Mais elles devraient s’étendre à Deir Al-Balah, dans le centre du territoire, puis Khan Younès, dans le sud, d’ici la fin septembre.
Pour le Secrétaire général de l’ONU, les estimations du nouveau rapport de l’IPC ne relèvent pas du mystère : « Il s’agit d’une catastrophe d’origine humaine, d’une condamnation morale et d’un échec pour l’humanité », a déploré António Guterres, avant d’ajouter : « La famine n’est pas une question de nourriture ; c’est l’effondrement délibéré des systèmes nécessaires à la survie humaine ».
Depuis des mois, les agences humanitaires onusiennes réclament un accès humanitaire sans entrave au territoire palestinien, où des centaines de milliers de Gazaouis passent plusieurs jours chaque semaine sans rien manger. Elles s’alarment de la hausse continue des décès liés à la faim, de la progression rapide de la malnutrition aiguë chez les enfants et de l’effondrement de la consommation alimentaire. En vain, jusqu’ici.
Les obligations d’Israël
Le chef de l’ONU a rappelé qu’Israël, en tant que puissance occupante, a des obligations claires au regard du droit international, dont celui d’assurer l’approvisionnement en nourriture et en médicaments de la population.
Le déni de ces responsabilités, a-t-il insisté, ne saurait continuer. « Il n’y a plus d’excuses. Ce n’est pas demain qu’il faut agir, c’est maintenant ».
Les agences de l’ONU présentes à Gaza se sont jointes à son appel en réclamant un cessez-le-feu immédiat pour permettre enfin une réponse humanitaire à grande échelle, ainsi que la libération immédiate de tous les otages enlevés par le Hamas et d’autres groupes armés lors des attaques du 7 octobre 2023 contre Israël.
D’une même voix, l’Unicef, l’Organisation mondiale de la santé (OMS), le Programme alimentaire mondial (PAM) et l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) ont exprimé leur vive inquiétude face à l’intensification de l’offensive militaire sur la ville de Gaza, dont le plan de conquête a été approuvé hier par les autorités israéliennes.
« Beaucoup – en particulier les enfants malades et malnutris, les personnes âgées et les personnes handicapées – ne seront pas en mesure d’évacuer », préviennent les agences dans un communiqué conjoint.
Une famine appelée à s’étendre
D’ici fin septembre, plus de 640.000 personnes devraient atteindre des niveaux « catastrophiques » d’insécurité alimentaire (phase 5 de l’IPC, dite famine) dans l’ensemble de la bande de Gaza. Plus d’un million d’autres se trouveront en situation d’urgence (phase 4), et 396 000 en situation de crise (phase 3).
Les conditions dans la zone la plus au nord de l’enclave seraient selon les experts aussi graves, voire pires, que dans la ville de Gaza. Mais le manque de données n’a pas permis une classification officielle.
Outre Gaza, le Soudan est le seul autre territoire au monde à être officiellement touché par la famine à l’heure actuelle. L’ONU rappelle que la famine est déclarée lorsque trois seuils critiques sont franchis : privation alimentaire extrême, malnutrition aiguë et décès liés à la faim. La dernière analyse confirme, preuves à l’appui, que ces critères sont désormais atteints (pour une meilleure compréhension de ce qu’est la famine, veuillez consulter notre article).
Une famine au XXIe siècle
Pour Tom Fletcher, le chef de l’humanitaire de l’ONU, la responsabilité d’Israël ne fait aucun doute. « C’est une famine du XXIe siècle, surveillée par des drones et la technologie militaire la plus avancée de l’histoire », a-t-il déploré.
Cette situation aurait selon lui pu être évitée si l’aide humanitaire n’avait pas systématiquement été bloquée aux portes de Gaza au cours des cinq derniers mois. « La nourriture s’accumule aux frontières en raison de l’obstruction systématique d’Israël. C’est une famine à quelques centaines de mètres des vivres, dans une terre fertile. C’est une famine que nous n’avons cessé de signaler – mais que les médias internationaux n’ont pas été autorisés à couvrir », a-t-il affirmé.
Et d’élargir le constat : « C’est la famine du monde entier. Une famine qui demande : “Mais qu’avez-vous fait ?” Une famine qui nous hantera tous – et doit nous hanter ».
Possible crime de guerre
Le Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits humains, Volker Türk, est allé plus loin. Si la famine est bien, comme il le pense, la « conséquence directe » des politiques du gouvernement israélien, certaines conclusions s’imposent du point de vue du droit international.
« Recourir à la famine comme méthode de guerre constitue un crime de guerre, et les décès qui en résultent pourraient également constituer un crime de guerre d’homicide volontaire », a-t-il déclaré.

© UNICEF/Eyad El Baba.
Une jeune fille souffrant de malnutrition grave à Gaza a besoin d’aide pour enfiler ses vêtements.
Les enfants en première ligne
La malnutrition des enfants s’aggrave à un rythme catastrophique. En juillet, plus de 12.000 enfants ont été identifiés comme souffrant de malnutrition aiguë, le chiffre mensuel le plus élevé jamais enregistré.
Depuis la dernière analyse IPC en mai, le nombre d’enfants susceptibles de mourir de malnutrition d’ici la fin juin 2026 a triplé, passant de 14.100 à 43.400. « Les signes étaient indéniables : des enfants émaciés, trop faibles pour pleurer ou manger ; des bébés mourant de faim et de maladies évitables ; des parents arrivant dans les cliniques sans rien pour nourrir leurs enfants. Il n’y a pas de temps à perdre », a constaté Catherine Russell, directrice générale de l’UNICEF.
Chez les femmes enceintes et allaitantes, le nombre de cas estimés a également triplé. L’impact est visible : un bébé sur cinq naît prématurément ou avec un poids insuffisant.
Les humanitaires présents sur le terrain, à l’instar du Dr Rik Peeperkorn, qui représente l’OMS dans les territoires palestiniens occupés, décrivent une réalité atroce.
« Les équipes, dont je fais partie, ont vu des gens mourir de faim, des corps frêles […] des enfants qui avaient en réalité cinq ans et qui ressemblaient à des enfants de deux ans, visiblement mal nourris », a-t-il rapporté.
Une terre stérilisée
Depuis juillet, les entrées de nourriture et d’aide dans l’enclave palestinienne ont légèrement augmenté mais restent largement sporadiques et insuffisantes face à l’ampleur des besoins.
Dans le même temps, environ 98 % des terres cultivées du territoire sont détruites ou inaccessibles, décimant l’agriculture et la production locale.
Source : ONU Info
https://news.un.org/fr/…
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