Par Ibrahim al-Amin

Source : Al-Akhbar, 18 octobre 2024

Traduction : lecridespeuples.substack.com

Dans le monde de la politique, la terminologie fait partie intégrante des récits véhiculés par ceux qui participent à une grande bataille. Inutile de remonter très loin dans l’histoire : souvenons-nous simplement qu’après les premières semaines de la guerre d’anéantissement menée par l’ennemi à Gaza, certains ont commencé à nous inviter à réfléchir au « jour d’après ». En l’examinant de plus près, ce terme apparaît immédiatement comme une ruse des parrains et alliés de l’ennemi pour se soustraire à leur responsabilité d’arrêter le génocide, tout en constituant un signe d’espoir pour les agents des ennemis américains et israéliens qui attendent de récolter les fruits de cette guerre.

L’idée du « jour d’après » repose sur un bouleversement total de la situation, partant du principe que tout ce qui existait avant la guerre ne doit plus exister après. Cela signifie, en réalité, une capitulation totale face à l’ennemi.

À Gaza, par exemple, ceux qui ont rapidement lancé l’initiative du « jour d’après » agissent comme si la Résistance avait échoué et que son époque était révolue. Lorsqu’ils évoquent le « jour d’après », ils cherchent à détourner l’attention du peuple de notre « jour présent ». S’étant déjà exemptés de la mission de résister à l’ennemi, ils promeuvent l’idée que les gens n’ont aucun rôle à jouer dans leur propre « présent ».

Face à cela, il est impératif de clore définitivement ce débat et d’agir selon une règle claire : nous sommes au cœur de la bataille de « l’aujourd’hui », et toute discussion sur « demain » ne nous concerne absolument pas. Ce terme appartient aux ennemis et à ceux qui cherchent à déplacer le pays d’un bord à l’autre, en se dérobant à leur rôle dans le « présent », ce qui n’est pas notre vocation.

« Aujourd’hui » est un jour sans fin, une suite de longues journées, dont le seul mot d’ordre est : « Résistance et persévérance ». Quiconque se sent concerné par cette lutte contre ce vaste ensemble d’ennemis ne doit pas se laisser happer par leurs débats ni par leurs projections présentées comme des vérités. Il doit, au contraire, rester concentré sur les exigences de notre « présent », celles qui dictent notre participation et notre contribution à cette résistance sacrée. Quant à ceux qui fuient ce devoir, ils appartiennent à leur « jour d’après » qui n’existe que dans leur imagination, d’autant plus qu’ils savent eux-mêmes que seul notre présent façonne l’avenir que nous vivons et que nous bâtissons.

Comme à Gaza, il en va de même au Liban : à peine quelques jours après le début de l’offensive brutale de l’ennemi contre le Liban, les partisans du projet hostile nous interrogeaient déjà sur le « jour d’après ». Ils agissent, avec rage et malveillance, comme si l’ennemi avait remporté la guerre, considérant que toute résistance actuelle est futile. Si nous nous penchons sur ce qu’ils attendent du « jour d’après », nous constatons qu’ils reviennent aux mêmes ambitions et rêves que nous avons combattus depuis la création de cet entité monstrueuse. Ce sont des objectifs que les ennemis américains et israéliens n’ont pas réussi à atteindre pendant des décennies, malgré toutes les guerres qu’ils ont menées à cette fin.

Mais, fidèles à eux-mêmes, ils persistent, voyant dans la poursuite de la résistance une forme de « déni » ou de « fanfaronnade ». Ils le font avec une grande arrogance, car leur projet repose sur l’idée que la résistance est vaine, qu’elle coûte trop cher et n’apporte que destruction et ruine. Ils cherchent à convaincre les gens que la bataille est perdue et appellent à une reddition totale. Certains ont déjà prôné la reddition en la qualifiant d’ « acte salvateur », qui constitue en réalité l’essence de ce que les ennemis souhaitent.

Aujourd’hui, notre pays est en état de résistance, et ceux qui ont renoncé essaient de nous convaincre que la soumission est la voie du salut, agissant comme ils l’ont fait par le passé, en prétendant que la bataille s’est terminée par la victoire de l’ennemi.

Mais ces gens-là ont-ils demandé à l’ennemi lui-même sa vision du « jour d’après » ? Quelqu’un peut-il trouver chez l’ennemi une idée concrète de ce que serait ce « jour d’après » ? Y a-t-il un véritable débat parmi les ennemis américains et israéliens sur leur propre avenir après cette guerre ? Certainement pas. Pourquoi ? Parce qu’ils ne se sentent pas concernés par le « jour d’après », ayant conçu ce concept pour les autres, pas pour eux-mêmes, et agissent en présumant qu’ils sortiront de la guerre victorieux.

Ce que font les ennemis aujourd’hui, dans notre présent, c’est mener la bataille la plus féroce contre le plus puissant mouvement de résistance aux occupations américaine et israélienne dans notre région et notre pays. Leur stratégie repose exclusivement sur la violence, l’extermination de l’autre : que ce soit par annihilation directe, comme c’est le cas actuellement à Gaza et au Liban, ou en tuant l’esprit des gens, les réduisant à de simples machines et numéros dans un monde dominé par ce monstre capitaliste, aujourd’hui plus impitoyable et vil que jamais, comme en témoignent les errances du progrès dans les forteresses de l’Occident.

Quant à nous, nous ne sommes pas en dehors de l’histoire, et notre « jour présent » est l’héritage pour lequel tous ceux qui sont tombés ont lutté et se sont sacrifiés. C’est la voie vers l’avenir que nous désirons pour nous-mêmes. Cela nous pousse à faire des choix difficiles, impliquant fatigue et sacrifices, mais aussi une liberté bien plus précieuse que l’asservissement.

Notre présent est un jour qui nous confronte à de grands défis. Il impose aussi notre ordre du jour, qui se concentre sur la préservation de la Résistance, la garantie de sa continuité, et la protection de ses membres, de son corps et de ses moyens de production. Tout ce que nous accomplissons aujourd’hui prépare l’élimination de leur « jour d’après ». Ceux qui croient que cette guerre permettra aux ennemis de persister longtemps ne comprennent pas la portée des sacrifices faits aujourd’hui. Ce que font les résistants, ici et maintenant, est le véritable acte du « présent ». C’est aujourd’hui que se forgent nos lendemains, à l’image de ceux qui se sont sacrifiés avant nous !

Ibrahim al-Amin, rédacteur en chef du quotidien libanais Al-Akhbar

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Source : Le Cri des Peuples
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