Base pétrolière interarmées - J.Peschel © ECPAD

Base pétrolière interarmées – J.Peschel © ECPAD

Par Régis de Castelnau

Qu’est-ce que j’apprends ? L’armée française viendrait donc de menacer la France d’un coup d’État visant à renverser la République pour instaurer une féroce et sanglante dictature ? Alors grand émoi dans le poulailler, chacun y va de son couplet, et dans un jeu de rôle finalement assez classique on entend d’une part des « ben quoi ? » pour ceux qui sont contents, et d’autre part les « no pasaran » de ceux qui dans la gôgoche s’imaginent pouvoir un peu se sentir moins seuls en psalmodiant les vieux slogans.

Deux petites observations sur l’origine de l’émoi avant de passer en revue quelques réactions qui en disent long sur ce qu’est devenu le débat politique dans notre pays et sur ceux qui en sont les acteurs.

D’abord il faut lire attentivement le texte des 1000 milis (je l’écris comme ça pour l’allitération) qui seront bien plus que ça en arrivant au port. Prétendre qu’il ne s’agit pas d’un appel à une intervention de l’armée dans le fonctionnement de la République pour peser sur ses orientations politiques, témoigne d’une joviale mauvaise foi. On peut difficilement être plus clair. Et tenter de donner le change avec des exégèses juridico-tortueuses du texte, en prétendant n’y voir qu’une liberté d’expression toute banale, c’est quand même se moquer du monde. Quand des milliers de militaires du cadre de réserve ou pas, normalement priés de la fermer, viennent dire solennellement que ça ne va pas et ne peut pas continuer comme ça, on peut légitimement se dire qu’ils pourraient un peu s’énerver si justement ça continue comme ça. Et enfin quand l’on entend qu’au sein de l’armée d’active, tout le monde trouve que tout va très bien et réprouve l’initiative des camarades, difficile d’éviter de basculer dans fou rire.

Ensuite, ce qui est quand même assez sidérant c’est l’absence de réaction du pouvoir d’État pendant plusieurs jours. Il a fallu que Jean-Luc Mélenchon agite un peu le cocotier, pour entendre deux préposées gouvernementales (Marlène Schiappa ça ne compte pas, elle dit toujours n’importe quoi) à la corvée. Munies de pitoyables éléments de langage, elles sont venues nous dire que tout ça ce n’était pas grave, juste un mouvement d’humeur de quelques vieilles ganaches en charentaises qui s’emmerdaient dans leur EHPAD. Aurait-on espéré que tout cela passe sous l’éteignoir dans les bruits de l’orchestre des affaires Halimi, Viry-Châtillon et Rambouillet ? On rappellera quand même que pour avoir dit à peu près la même chose il y a quelques temps, Francis Lalanne s’est retrouvé avec la maréchaussée au derrière.

Les réactions maintenant :

•            c’est l’acrobate Jean-Luc Mélenchon qui a tonné que les barbares étaient aux portes et la république en danger. Acrobate parce que rattrapé par des tweets antérieurs dans lesquelles il rappelait que depuis la Révolution française, l’insurrection était un devoir, il vient dire maintenant que l’insurrection même imaginaire, c’est juste trop mal. Quelques seconds couteaux LFI, également équipés d’éléments de langage ronflants, s’y sont collés. Avant déposer des plaintes au procureur, ce qui est pour eux désormais une habitude donnant l’impression d’un concours avec Plenel, le premier délateur de France. On rappellera qu’à LFI, on passe son temps à se plaindre d’être victime de « law fare » ces manœuvres (réelles) de la magistrature socialiste à leur encontre. Mais qu’ils trouvent plus confortable de combattre leurs adversaires politiques par procureurs et juges interposés.

•            Ils ont été rejoints par toute une cohorte de gauchistes fourbus, rangés en deux catégories : ceux qui ont vraiment peur, et ceux qui ont peur vraiment. Vraiment peur du fascisme, il y a suffisamment d’imbéciles pour garnir cette catégorie. Les autres c’est plutôt la panique d’y voir un symptôme de l’effondrement général de leur gogôche. Et les lendemains matériellement pénibles que cela annonce pour leurs niches alimentaires respectives. Certains de ces castors se disant terrifiés ont fait référence, avec la publication de ce texte, à la pantalonnade du 22 avril 1961 à Alger qui aurait menacé la France d’une dictature fasciste. Charles de Gaulle avait torché ça en cinq minutes et en avait profité pour remettre de l’ordre dans une armée que les socialistes de Guy Mollet avaient dévoyée en lui donnant le goût de la sédition. On pouvait lire ici et là, que l’appel des 1000 avait été publié le 13 avril volontairement à proximité de la date anniversaire du 22 !!!

•            Du côté macroniste, on a eu droit à un communiqué désinvolte et méprisant de Florence Parly, paraît-il ministre de la défense. On avec elle, un concentré d’apparatchik socialiste cupide ayant passé toute sa carrière à se gaver d’argent à coup de pantouflages juteux et de parachutes dorés exorbitants. Et une fois lancé son crachat, assorti de demandes de sanctions , elle est vite retournée à son néant lucratif.

•            Et puis il y a eu Madame, comment dites-vous, Pannier-Runacher, c’est ça ? Elle aussi paraît-il ministre (ne me demandez pas de quoi, je n’en ai aucune idée). Adoptant également le registre du mépris et récitant une leçon apprise par cœur dont elle semblait ignorer le sens. Si elle a vraiment peur d’un coup d’État, on va la rassurer, parce chez les putschistes, il ne viendrait à l’idée de personne de l’arrêter. Nul ne la connaît, et tout le monde s’en fout.

•            En face, ce fut un festival de mauvaise foi. D’abord de Zemmour à Pascal Praud en passant par Yvan Rioufol, Philippe de Villiers ou Florian Philippot ce n’était que, la main sur le cœur, une défense hypocrite de la liberté d’expression (!). Marine Le Pen quant à elle s’est fendue d’un gaullien : « Messieurs les généraux, rejoignez-moi dans la bataille pour la France ». Pourquoi se gêner ? Du côté LR on a courageusement regardé le bout de ses chaussures.

Alors, puisqu’il faut quand même essayer d’être sérieux, disons clairement que cette pétition n’annonce pas l’arrivée prochaine d’un Augusto Pinochet à l’Élysée. Elle caractérise une « libération » de la parole, qui fait que l’on entend proférer tranquillement des choses impensables il y a seulement deux ans.

L’enjeu de l’élection présidentielle de 2022 sera de fait très simple à énoncer : Macron, stop ou encore ? Ou formulé autrement le « bloc populaire » parviendra-t-il à chasser le champion du « bloc élitaire » ?

Pour l’instant la partie populaire du premier fait confiance à Marine Le Pen…

Source : Vu du Droit
https://www.vududroit.com/…