Le groupe armé Tanière des Lions dans la vieille ville de Naplouse, photo publiée le 3 septembre 2022

Par Dr Ramzy Baroud

Des mois difficiles en perspective : Pourquoi Israël a peur de la tanière des lions

Source : Middle East Monitor, 18 octobre 2022

Traduction : lecridespeuples.fr

Ce titre du journal israélien Jerusalem Post ne raconte qu’une partie de l’histoire : « La tanière des lions et d’autres groupes palestiniens sont un casse-tête sans fin pour Israël et l’Autorité palestinienne ».

Il est vrai que le gouvernement israélien et l’Autorité palestinienne (AP) s’inquiètent tous deux de la perspective d’une révolte armée généralisée en Cisjordanie occupée, et que la nouvelle brigade basée à Naplouse, la Tanière des Lions, est l’épicentre de ce mouvement mené par des jeunes.

Cependant, la résistance armée croissante en Cisjordanie est plus qu’un simple « mal de tête » pour Tel Aviv et Ramallah. Si ce phénomène continue à prendre de l’ampleur, il pourrait menacer l’existence même de l’AP, tout en plaçant Israël devant son choix le plus difficile depuis l’invasion des principales villes palestiniennes de Cisjordanie en 2002.

Bien que les commandants militaires israéliens continuent de saper le pouvoir du groupe nouvellement formé, ils ne semblent pas avoir d’idée précise quant à ses racines, son influence et son impact futur.

Dans une récente interview accordée au journal israélien Yedioth Ahronoth, le ministre israélien de la défense, Benny Gantz, a affirmé que la Tanière des Lions est un « groupe de 30 membres », qui finira par être atteint et éliminé. « Nous mettrons la main sur les terroristes », a-t-il déclaré.

La Tanière des Lions n’est cependant pas un cas isolé, mais fait partie d’un phénomène plus large qui comprend les Brigades de Naplouse, les Brigades de Jénine et d’autres groupes, qui se trouvent principalement dans le nord de la Cisjordanie.

Ce groupe, ainsi que d’autres unités militaires palestiniennes armées, ont réagi activement au meurtre de Palestiniens, notamment d’enfants, de personnes âgées et même, le 14 octobre, d’un médecin palestinien, Abdullah Abu Al-Teen, qui a succombé à ses blessures à Jénine. Selon le ministère palestinien de la santé, plus de 170 Palestiniens ont été tués en Cisjordanie et à Gaza, depuis le début de l’année.

Les Palestiniens ont notamment tué deux soldats israéliens, l’un à Shuafat le 8 octobre et l’autre près de Naplouse le 11 octobre.

À la suite de l’attaque de Shuafat, Israël a complètement bouclé le camp de réfugiés de Shuafat comme une forme de punition collective, similaire aux récents sièges de Jénine et d’autres villes palestiniennes.

Citant les médias hébreux d’Israël, le quotidien arabe palestinien Al Quds a rapporté que l’armée israélienne concentrera ses opérations dans les semaines à venir sur la Tanière des Lions. Des milliers de soldats d’occupation israéliens supplémentaires seront probablement déployés en Cisjordanie pour la bataille à venir.

Il est difficile d’imaginer qu’Israël mobilise une grande partie de son armée pour combattre 30 combattants palestiniens à Naplouse. Mais il n’y a pas qu’Israël : l’Autorité palestinienne est elle aussi terriblement inquiète.

L’Autorité a tenté, sans succès, de séduire les combattants en leur proposant un « accord » de reddition, selon lequel ils déposeraient les armes et rejoindraient les forces de l’AP. De tels accords ont été proposés par le passé aux combattants appartenant aux Brigades des Martyrs d’Al Aqsa du Fatah, avec un succès mitigé.

Cette fois-ci, la stratégie n’a pas fonctionné. Le groupe a rejeté les ouvertures de l’AP, obligeant le gouverneur de Naplouse affilié au Fatah, Ibrahim Ramadan, à s’en prendre aux mères des combattants en les qualifiant de « déviantes » pour avoir « envoyé leurs fils se suicider ». Ce langage, similaire à celui utilisé par les Israéliens et les pro-israéliens dans leur description de la société palestinienne, met en évidence les schismes massifs entre le discours politique de l’AP et celui des Palestiniens.

Non seulement l’AP perd son emprise sur le récit, mais elle perd également les vestiges de contrôle qu’il lui reste en Cisjordanie, en particulier à Naplouse et à Jénine.

Un haut fonctionnaire palestinien a déclaré à Media Line que la « rue » palestinienne ne nous fait plus confiance, car elle « nous considère comme une extension d’Israël ». C’est vrai, mais ce manque de confiance est en gestation depuis des années.

L’ « Intifada de l’unité » de mai 2021 a toutefois constitué un tournant majeur dans les relations entre l’AP et les Palestiniens. La montée en puissance de la Tanière des Lions et d’autres groupes armés palestiniens ne sont que quelques manifestations des changements spectaculaires en cours en Cisjordanie.

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Source : Le Cri des Peuples
https://lecridespeuples.fr/…