Des chars ukrainiens descendent une rue à Irpin, dans la banlieue de Kiev,
en Ukraine, le lundi 11 avril 2022. (AP Photo/Evgeniy Maloletka)

Par Andre Damon

Au moment où les États-Unis, le Royaume-Uni et d’autres puissances de l’OTAN envoient en masse des armes en Ukraine, l’Alliance atlantique se transforme en une force de combat capable de mener directement des guerres avec la Russie et la Chine.

Utilisant la guerre entre la Russie et l’Ukraine comme prétexte, l’OTAN a déjà mobilisé contre la Russie sa force de réaction rapide de 40.000  hommes. Mais ce n’est là que le début d’une transformation beaucoup plus vaste en vue de ce que les planificateurs militaires américains appelent le «conflit entre grandes puissances».

Dans une interview accordée au Telegraph, le secrétaire général de l’OTAN, Jens Stoltenberg, a déclaré que cette transformation visait à «passer de la dissuasion par alarmes à quelque chose qui relève davantage de la dissuasion par le déni ou la défense. Ce processus est déjà en cours. Nous devons nous assurer que nous continuons à être capables, dans un monde plus dangereux, de protéger et de défendre tous les alliés de l’OTAN».

Stoltenberg a précisé que si le prétexte immédiat de la «transformation» de l’OTAN était la guerre en Ukraine, la Chine était tout autant visée que la Russie.

«Nous finalisons le travail sur le nouveau concept stratégique qui sera approuvé lors du sommet de l’Otan en juin… Et là, je m’attends à ce que la Chine joue un rôle important».

La Chine, a-t-il affirmé, investissait massivement dans «de nouvelles capacités nucléaires modernes, des missiles à longue portée qui peuvent atteindre tout le territoire de l’Otan… Il est également préoccupant de constater que la Russie et la Chine collaborent de plus en plus étroitement».

Depuis 2014, a déclaré Stoltenberg, «nous avons mis en œuvre le plus grand renforcement de l’OTAN depuis la fin de la Guerre froide».

Un aspect crucial de cette transformation sera l’intégration dans l’OTAN de toute une série d’États proches des frontières de la Russie.

Lundi, le Times de Londres a rapporté que la Finlande et la Suède s’apprêtaient à adhérer à l’OTAN d’ici quelques mois. Selon ce journal, l’adhésion des deux pays a été «un sujet de conversation et de multiples séances» lors des «entretiens entre les ministres des Affaires étrangères de l’Alliance la semaine dernière, auxquels ont participé la Suède et la Finlande».

Selon le Times, la Finlande devrait déposer sa demande d’adhésion en juin, suivie de près par la Suède.

Stoltenberg a insisté pour dire que «la décision même d’accueillir la Finlande au sein de l’OTAN peut être prise très rapidement. Il s’agit ensuite d’un processus formel dans les capitales ou les parlements pour la ratifier».

Au cours du week-end, l’OTAN a organisé une série de jeux de guerre en Lituanie, appelés «Rising Griffin». 1.000  soldats et 200  véhicules ont participé à cette manœuvre.

Le ministère américain de la Défense a décrit ainsi l’exercice : «Le groupement tactique Lituanie, de la Présence avancée renforcée (eFP) de l’OTAN, a rejoint un bataillon du 66e  régiment blindé de l’armée américaine. Ensemble ils entament des manœuvres d’entraînement dans les forêts denses de cet État balte».

«Pour l’exercice Rising Griffin, les troupes ont effectué une marche sur route depuis leur base de Rukla jusqu’aux terrains d’entraînement de Pabradė, démontrant ainsi leur capacité à communiquer et à se déplacer ensemble».

«Pour démontrer la détermination des Alliés à défendre le territoire de l’Alliance, l’armée américaine a prolongé le déploiement du 3e  bataillon du 66e  régiment blindé après l’invasion de l’Ukraine par la Russie. C’était le quatrième bataillon à être envoyé en Lituanie depuis 2019, lorsque le gouvernement lituanien avait demandé le déploiement d’un escadron de cavalerie».

Depuis 2016, l’OTAN a stationné des groupements tactiques de «présence avancée renforcée» en Pologne, en Estonie, en Lettonie et en Lituanie, chacun de ces pays membres de l’OTAN étant limitrophe de la Russie.

Le Guardiannote que «la guerre en Ukraine a conduit l’alliance à renforcer encore sa présence dans la région, des bataillons multinationaux devant être envoyés en Roumanie, en Bulgarie, en Hongrie et en Slovaquie. La présence militaire en Lituanie a été portée d’environ 1.200 à quelque 1.600  soldats et équipée de nouveaux matériels, tels que le système antiaérien léger et mobile Ozelot de l’armée allemande».

Lors d’une visite à Kiev, la capitale ukrainienne, au cours du week-end, le premier ministre britannique Boris Johnson a qualifié la défense de Kiev par les Ukrainiens de «plus grand fait d’armes du 21e  siècle».

Dans l’intervalle, l’étendue réelle de l’implication des États-Unis et de l’OTAN dans le conflit devient claire. Georges Malbrunot, le correspondant international principal du Figaro, a écrit sur Twitter: «‘Des unités d’élite des forces spéciales SAS se trouvent présentes en Ukraine depuis le début de la guerre. Tout comme les Deltas américains’, confie une source du renseignement français».

Malbrunot a déclaré qu’il s’était récemment rendu en Ukraine aux côtés de deux combattants étrangers et a dit à un journal télévisé français: «J’ai eu la surprise, et eux aussi, de découvrir que pour bien entrer dans l’armée ukrainienne, ce sont les Américains qui sont aux commandes». Il a ajouté que l’empreinte américaine était «importante».

Le renforcement massif de l’OTAN a lieu alors que la guerre en Ukraine entre dans une nouvelle phase et que les puissances de l’OTAN cherchent à mettre en déroute les forces russes sur le champ de bataille. «Une autre bataille s’annonce, la bataille pour le Donbass», a déclaré dimanche Dmytro Kuleba, le ministre ukrainien des Affaires étrangères, dans l’émission «Meet the Press» de NBC.

S’exprimant au siège de l’OTAN la semaine dernière, Kuleba a déclaré: «La bataille pour le Donbass vous rappellera, et je regrette de le dire, mais c’est vrai, la bataille pour le Donbass vous rappellera la Seconde Guerre mondiale.» Cette bataille «verra des opérations à grande échelle, des manœuvres, la participation de milliers de chars, de véhicules blindés, d’avions, d’artillerie… Ce ne sera pas une opération locale, d’après ce que nous voyons dans les préparatifs de la Russie. La Russie a son plan, nous avons le nôtre. Et le résultat sera décidé sur le champ de bataille».

Les États-Unis ont transféré 2,5  milliards de dollars d’armes à l’Ukraine depuis le début du gouvernement Biden. «Les États-Unis déploient des ressources, des armes, des équipements militaires, mais aussi des ressources diplomatiques pour soutenir les Ukrainiens», a déclaré Jake Sullivan, conseiller du président Biden en matière de sécurité nationale, lors de l’émission «Face à la Nation» diffusée dimanche sur CBS.

(Article paru d’abord en anglais le 12 avril 2022)

Source : WSWS
https://www.wsws.org/fr/…

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