Prisonniers palestiniens à la prison de Megiddo. Photo : Itzik Ben-Malki

Éditorial du Haaretz

Éditorial, Haaretz, 23/8/2022
Traduit par Fausto Giudice, Tlaxcala

Lorsqu’il s’agit de la détention administrative – l’une des tactiques gouvernementales les plus agressives que l’on puisse imaginer, étant une forme de détention sans jugement – il est impossible de se fier à la Cour suprêmee. Selon une enquête du Haaretz, la Cour n’a pas fait droit à une seule demande d’annulation d’un ordre de détention administrative depuis le début de l’année. Et l’Association pour les droits civils en Israël ne se souvient d’aucun cas où elle l’aurait fait – pas seulement cette année, mais jamais (Hagar Shezaf, Haaretz de lundi).

 Le fait que la Cour serve de blanc-seing au service de sécurité du Shin Bet et aux Forces de défense israéliennes en ce qui concerne les détentions administratives est particulièrement inquiétant étant donné l’utilisation massive qu’Israël fait de cette tactique draconienne. Le nombre de personnes détenues dans les prisons israéliennes sans jugement a atteint 723 la semaine dernière, soit le chiffre le plus élevé depuis 2008. Onze de ces détenus sont des citoyens ou résidents arabes d’Israël, les autres étant des Palestiniens. Aucun d’entre eux n’est juif.

Aucune charge n’est jamais retenue contre les détenus administratifs ; leur détention est considérée comme une arrestation préventive. Les preuves à leur encontre ne sont jamais entendues au tribunal. Même leurs avocats ne sont pas autorisés à voir ces preuves, à l’exception d’un bref résumé de quelques phrases décrivant les soupçons qui pèsent sur eux. Le droit international autorise la détention administrative, mais seulement si elle est utilisée de manière limitée, dans les cas où il existe une menace pour le bien-être public et qu’il n’y a pas d’autre moyen de l’empêcher. Pour Israël, cependant, ce n’est jamais assez.

Ce qui est inquiétant, c’est que l’État est libre de continuer sur sa lancée, car le public est complètement apathique sur cette question. L’hypothèse dominante est que si un Arabe a été détenu, il est indubitablement coupable. Si le détenu n’est pas juif, les Israéliens ne sont pas intéressés. Dimanche dernier, la cour a rejeté une demande de libération d’un détenu administratif en grève de la faim, Khalil Awawdeh, bien qu’il ait été hospitalisé au centre médical Shamir dans un état grave. Awawdeh a entamé sa grève de la faim en mars (elle a été brièvement suspendue en juin à la suite d’une fausse promesse selon laquelle il serait libéré s’il mangeait). Les juges de la Cour suprême Daphne Barak-Erez, Ofer Grosskopf et Alex Stein n’ont vu aucune raison d’intervenir, car le commandement central des FDI avait gelé l’ordre de détention administrative tant qu’Awawdeh était hospitalisé. C’est une raison ridicule, puisque l’ordre lui-même stipule que si Awawdeh quitte l’hôpital, sa détention reprendra.

En principe, les juges n’ont aucun problème avec le fait qu’Awawdeh soit en détention administrative depuis décembre. Après avoir examiné les documents classifiés contre lui, ils ont conclu qu’il existe une base factuelle “forte et solide” pour sa détention. C’est une conclusion étonnante. Si de telles preuves existent, alors pourquoi, après neuf mois de détention, l’État ne l’a-t-il pas inculpé, jugé, prouvé sa culpabilité et condamné à la prison ? 

Nous ne devons pas nous habituer à l’utilisation massive de cette tactique draconienne. Si l’État dispose de preuves contre les détenus administratifs, tant mieux, il doit les inculper et les juger. S’il n’a pas de preuves, il devrait les libérer immédiatement, et Awawdeh en premier.

Source : TLAXCALA
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