Par Finian Cunningham

Source : Sputnik, 24 février 2021

Traduction : lecridespeuples.fr

L’Union européenne, comme on le sait, est confrontée à un gros problème lié à la lenteur du déploiement des vaccinations contre la pandémie de Covid-19. Trois vaccins approuvés à ce jour par le bloc souffrent d’un déficit de production. Alors, pourquoi l’UE ne profite-t-elle pas du vaccin russe, le premier à avoir été créé et homologué, pour accélérer la campagne d’inoculation ?

Des responsables à Bruxelles ont affirmé que la Russie n’avait pas soumis suffisamment de données sur son vaccin Spoutnik V pour que l’Agence européenne des médicaments (AEM), l’organisme de réglementation, lui donne le feu vert pour l’administration.

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Cependant, les fabricants russes de Spoutnik V soutiennent qu’ils ont respecté toutes les exigences de données nécessaires définies par l’AEM. Mais celle-ci semble clairement réticente à le reconnaître et à l’éprouver, sans même parler de l’approuver.

Alors, où est le hold-up ? La formule russe a prouvé son efficacité contre la maladie. Une étude publiée dans la prestigieuse revue médicale à comité de lecture The Lancet a révélé que Spoutnik V était efficace et sûr à près de 92% contre les cas symptomatiques de Covid-19 dans un essai à grande échelle.

Le traitement russe est comparable en efficacité aux trois vaccins approuvés à ce jour par le régulateur européen : ceux produits par les sociétés pharmaceutiques occidentales AstraZeneca, Moderna et Pfizer-BioNTech.

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L’Europe est également de plus en plus consciente que le Spoutnik V pourrait jouer un rôle important dans l’accélération du programme de vaccination pour inoculer la population de l’Union. Les dirigeants d’Allemagne, de France et d’Irlande, entre autres, ont exprimé verbalement leur volonté d’incorporer le vaccin russe dans les plans nationaux pour atteindre les objectifs de vaccination.

D’autres pays seraient en train de poursuivre ce que l’on a appelé « l’opération Spoutnik » par laquelle ils passent des commandes pour le vaccin russe en prévision de l’approbation officielle de l’UE. La Hongrie, la Croatie, la Slovaquie et la République tchèque font partie des pays de l’UE qui sont en train de stocker le vaccin russe. Au total, 50 pays du monde ont déjà approuvé, commandé voire commencé la vaccination de leur population.

Malheureusement, ce qui semble jouer ici dans un sens déplorablement négatif, c’est un état d’esprit de suspicion et de russophobie venu de la guerre froide à l’encontre du vaccin russe.

Ursula Von der Leyen, présidente de la Commission européenne, a critiqué l’offre de la Russie de fournir du Spoutnik V. Elle a laissé entendre que Moscou essayait d’utiliser le vaccin comme une arme de soft power pour promouvoir l’image internationale de la Russie.

« Nous nous demandons toujours pourquoi la Russie offre, en théorie, des millions et des millions de doses sans progresser suffisamment dans la vaccination de sa propre population », a déclaré Von der Leyen lors d’une conférence de presse la semaine dernière.

Un tel cynisme est méprisable. L’implication est que la Russie aurait des objectifs sinistres plutôt qu’une explication plus simple étant celle de la solidarité et de l’intérêt mutuel de maîtriser la pandémie [d’autant plus que nombre de pays collaborent avec Moscou pour produire eux-mêmes le vaccin Spoutnik V].

La russophobie latente de Von der Leyen a été exprimée plus explicitement par la Pologne et les États baltes. Les politiciens y ont déclaré publiquement qu’ils n’accepteraient pas le vaccin russe même s’il était approuvé par l’UE.

Les États baltes sont même allés encore plus loin en affirmant que la Russie utilise la pandémie et la « diplomatie vaccinale » comme un moyen d’affaiblir l’Union européenne. Plus tôt ce mois-ci, la Première ministre lituanienne Ingrida Šimontė a affirmé que le vaccin russe était « une autre arme hybride [de Moscou] pour diviser et régner », ajoutant que le Président russe Vladimir Poutine n’avait pas l’intention d’utiliser le vaccin pour sa population (alors que plus de deux millions de Russes sont déjà vaccinés). 

Les seules personnes qui nuisent à l’UE sont des gens comme Von der Leyen et les russophobes à Bruxelles qui ne peuvent pas faire de politiques sans tout regarder à travers un prisme anti-russe. Ces mêmes personnes ont militarisé les relations avec la Russie avec un soutien inconditionnel à l’expansionnisme de l’OTAN le long des frontières de la Russie, tout en s’ingérant dans les affaires intérieures de la Russie en soutenant des provocateurs douteux comme Alexei Navalny et en appelant à l’annulation du projet de gazoduc Nord Stream 2.

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Le programme de vaccination de l’Europe est sans doute une pagaille supervisée par la bureaucratie incompétente de Bruxelles. Alors que des solutions potentielles sont à venir avec le vaccin russe Spoutnik V, les bureaucrates de Bruxelles s’interrogent sur les conceptions russes « diaboliques ».

Il n’est donc pas étonnant que plusieurs pays de l’UE ignorent les russophobes et procèdent à la commande de leurs propres approvisionnements nationaux en vaccin russe, sachant que leurs populations ne peuvent pas compter sur des décisions rationnelles et objectives prises à Bruxelles par des gens comme Von der Leyen. C’est la stupidité de ces personnes qui mine l’UE et son autorité centrale, pas la Russie.

Finalement, le besoin humain et le bon sens l’emporteront sur l’obstination de style guerre froide. Les populations réticentes qui veulent désespérément revenir à une certaine normalité sociale et économique ne toléreront pas les obstacles idéologiques à une vaccination efficace, proposée par le Spoutnik V russe. Et étant donné les problèmes de pénurie auxquels l’UE est confrontée avec les vaccins existants, les bureaucrates bruxellois vont devoir se montrer concrets en utilisant des solutions rationnelles, dont le vaccin russe est potentiellement un élément vital.

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Mais il est dommage que les scientifiques n’aient pas pu inventer un vaccin efficace contre la russophobie.

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Poutine : une campagne occidentale de désinformation œuvre
à saper les réalisations de la Russie en matière de médecine

Réunion du Conseil du Service fédéral de sécurité (FSB), 24 février 2021.

Source : kremlin.ru

Traduction : lecridespeuples.fr

Transcription :

[…] Je voudrais souligner que les questions de sécurité de l’État, la protection de nos citoyens contre les menaces internes et externes sont toujours au centre de l’attention des dirigeants du pays, qui les considèrent comme une priorité, et je dirais même une priorité absolue.

Nous pouvons voir qu’il n’y a pas de réduction de l’ampleur des défis mondiaux, tels que le terrorisme, la criminalité transfrontalière et la cybercriminalité. Dans ce contexte compliqué, nous devons également faire face à la soi-disant politique d’endiguement (containment) envers la Russie. En fait, c’est quelque chose dont nous sommes bien conscients depuis longtemps. Il ne s’agit pas de concurrence en tant qu’élément naturel des relations internationales, mais d’une politique cohérente et très agressive visant à perturber notre développement, à le ralentir et à créer des problèmes le long de notre périmètre et de notre contour extérieurs, provoquant une instabilité interne, sapant les valeurs qui unissent la société russe, et finalement, à affaiblir la Russie et à la forcer à accepter une gestion externe, comme cela se produit dans certains États post-soviétiques, comme nous pouvons le voir.

Ce n’est pas une exagération. En fait, vous n’avez pas besoin qu’on vous convainque que tel est le cas, car vous le savez très bien et peut-être même mieux que quiconque. Il suffit de lire les documents stratégiques accessibles au public et les déclarations extrêmement directes des responsables de plusieurs pays. Ils n’essaient même pas de cacher leur attitude hostile à l’égard de la Russie et de plusieurs autres centres indépendants et souverains de développement mondial.

Mais il ne s’agit pas seulement d’une rhétorique agressive, mais d’actions concrètes et réelles. Une campagne d’information ciblée est menée contre la Russie avec diverses accusations péremptoires et non fondées. Même des théories du complot absurdes et anecdotiques sont utilisées. Prenons par exemple les récentes tentatives de remise en cause de nos acquis en médecine, dans la lutte contre le coronavirus.

Soit dit en passant, bon nombre de nos partenaires sont très amicaux quant à nos résultats dans ce domaine. Ils sont prêts à coopérer avec nous et nous saluons également ce genre d’attitude. Nous comprenons que les problèmes mondiaux ne peuvent être résolus qu’en unissant nos efforts.

Néanmoins, comme vous le savez, de nombreuses tentatives ont été et sont faites, et je vous remercie pour les informations que vous fournissez aux dirigeants politiques du pays, sur les provocations prévues dans ce domaine. Mais nous y sommes habitués depuis longtemps et nous sommes prêts.

Ils essaient de nous enchaîner avec des sanctions économiques et autres, de bloquer de grands projets internationaux –ceux qui intéressent également nos partenaires, soit dit en passant–, de s’ingérer directement dans les affaires publiques et politiques en Russie, dans ses procédures démocratiques, et bien sûr les outils des services spéciaux sont utilisés contre nous.

Encore une fois, ce genre de politique envers la Russie est absolument futile. Nous sommes prêts à mener un dialogue ouvert, à trouver des solutions de compromis afin de pouvoir faire face aux problèmes les plus difficiles, sur la base de la confiance et du respect mutuels. Mais une chose est inconditionnelle pour nous, et c’est la souveraineté de la Russie, ses intérêts nationaux, la sécurité de nos citoyens et le droit de notre peuple de déterminer son propre avenir. Et ces valeurs, fondements de notre développement, doivent être protégées de manière fiable et sûre. […]

Voir également Poutine s’est-il fait vacciner, et soutient-il la vaccination obligatoire ?, Poutine sur le certificat de vaccination ou ‘passeport sanitaire’ & Le Covid-19, une arme biologique ? La réponse de Poutine

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Sergueï Lavrov : l’Europe est gangrénée
par l’atlantisme et la russophobie

Interview de Sergueï Lavrov, Ministre des Affaires étrangères de la Fédération de Russie, accordée au holding médiatique RBC, Moscou, 19 février 2021.

Source : Ministère des Affaires étrangères de la Fédération de Russie

Révision : lecridespeuples.fr

Journaliste : On a le sentiment que l’Occident est très irrité par l’apparition du vaccin russe Sputnik V. Au début, ils se sont vraiment comportés de manière très agressive et ne l’ont pas autorisé. Quand j’ai parlé au Ministre russe de l’Industrie et du Commerce, Dmitri Mantourov, il a déclaré que c’était une « guerre des vaccins ». Cet avis a changé à présent. S’agit-il vraiment uniquement de la qualité du vaccin ou la politique est-elle tout de même mêlée à ces décisions ?

Sergueï Lavrov : Ici s’applique certainement la logique du proverbe russe « J’en veux mais ça me coûte [de le demander et de l’obtenir] ». L’Occident sait que le Sputnik V est effectivement l’un des meilleurs, sinon le meilleur, vaccin. Sinon il n’y aurait pas autant de demandes. Et la demande grandit de manière exponentielle.

D’un autre côté, ils ont conscience du fait que la propagation du Sputnik V et d’autres vaccins russes qui sortiront prochainement sur le marché international signifie une hausse de l’autorité et de la réputation de la Russie sur la scène internationale. Ils ne le veulent pas. Mais ils ont pris conscience du fait que la première réaction était complètement révoltante du point de vue des faits, du point de vue de la science médicale. Quand, en août 2020, le Président russe Vladimir Poutine a annoncé la création du vaccin, les attaques n’étaient pas du tout diplomatiques : elles laissaient transparaître l’irritation, vous avez absolument raison.

Aujourd’hui, plusieurs pays (la République tchèque et d’autres) disent qu’ils veulent attendre que le vaccin Sputnik V soit certifié par l’Agence européenne des médicaments. La Hongrie estime être déjà prête, et les livraisons commencent. Le nombre de requêtes en provenance d’Europe grandit constamment. Il y a à peine quelques jours, le Prince Albert II de Monaco a demandé de fournir des vaccins pour toute la population de la Principauté.

Après la publication des avis scientifiques des structures indépendantes, l’Occident a été contraint de reconnaître que ce vaccin était bon. Néanmoins, les tentatives de le discréditer se poursuivent.

Hier encore, j’ai lu une déclaration assez équivoque du Président français Emmanuel Macron, dans laquelle il nous a classés avec les Chinois parmi ceux qui tenteraient soi-disant d’obtenir des avantages sur la scène internationale grâce à nos réalisations médicales. Avant-hier, la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen a prononcé une déclaration avec des insinuations très négatives vis-à-vis des livraisons de vaccin russe dans d’autres pays.

Nous devons rester attachés à la position fondamentale très juste initialement exprimée par le Président russe Vladimir Poutine : nous avons été les premiers à créer un tel vaccin et nous élargirons sa production. Ce n’est pas facile, nous n’aurons pas suffisamment de capacités, c’est pourquoi nous nous entendons avec l’Inde, avec la Corée du Sud et avec d’autres pays. En même temps, il a déclaré que nous étions ouverts à une très large coopération.

Autre point très important. Quand ce problème a été récemment soulevé à l’ONU, le Secrétaire général de l’Onu Antonio Guterres a appelé à ce que les pays qui détenaient ce vaccin ou de l’argent pour l’acquérir n’oublient pas les pays pauvres. Or, on cherche à nous accuser de marquer des points géopolitiques en faisant des livraisons à l’étranger. Il y a clairement une contradiction, et évidemment, l’Occident est mal placé pour lancer une telle discussion.

Journaliste : C’est la même chose quand le Président russe Vladimir Poutine déclare au forum de Davos qu’on ne peut pas vivre uniquement au profit des pays riches, mais de facto nous sommes accusés de livrer des vaccins au profit de ces pays riches. Mais tout de même, cette attitude envers le vaccin est-elle due à son origine russe ?

Sergueï Lavrov : Je ne trouve pas d’autre explication, parce que personne n’a ne serait-ce que tenté d’en réaliser une analyse médicale ou scientifique. Il a été simplement dit immédiatement que cela était impossible parce que cela ne pouvait pas exister :  « Personne ne fait rien aussi vite. » C’est seulement en octobre 2020 que les Occidentaux ont annoncé qu’ils pouvaient expliquer où ils en étaient. Alors que le Président russe Vladimir Poutine a déclaré en août déjà que le vaccin russe était prêt.

Malheureusement, je constate très souvent que la réaction à tous ce que nous faisons, disons et proposons est immédiatement méfiante. Dans le meilleur des cas. En règle générale, on entend que « les Russes jouent encore à leurs jeux géopolitiques ».

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Source : Le Cri des Peuples
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