Le représentant suppléant des États-Unis aux Nations Unies, l’ambassadeur Robert Wood, votant contre une résolution de l’ONU pour un cessez-le-feu à Gaza, le 8 décembre 2023 [Photo: United Nations]

Par Andre Damon

Vendredi, les États-Unis ont opposé leur veto à une résolution du Conseil de sécurité des Nations unies appelant à un cessez-le-feu à Gaza, contre le vote de tous les autres membres du Conseil de sécurité, à l’exception de la Grande-Bretagne, qui s’est abstenue.

Ce vote montre clairement que les États-Unis ne sont pas de simples spectateurs du génocide israélien: ils y participent activement. Le président américain Joe Biden et le secrétaire d’État, Antony Blinken, ne sont pas moins coupables que le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahou.

Les États-Unis, qui ont été pleinement informés des plans d’Israël visant à assassiner une grande partie de la population palestinienne et à repousser le reste dans le désert du Sinaï, soutiennent et approuvent pleinement ces plans. Ils facilitent activement le génocide en fournissant des milliards de dollars d’armes, y compris en ayant annoncé vendredi qu’ils enverraient plus de 100 millions de dollars en munitions pour chars d’assaut, sans contrôle du Congrès.

Les États-Unis ont commis des crimes horribles, du massacre de My Lai au Viêt Nam à la torture des détenus dans le donjon d’Abou Ghraib dans l’Irak occupé. Mais leur participation ouverte à l’assassinat massif et systématique de femmes et d’enfants sans défense, retransmis dans le monde entier, marque une nouvelle étape, manifestement criminelle, dans la politique étrangère américaine.

L’administration Biden accueille le bain de sang à Gaza parce qu’elle considère l’État d’Israël comme une composante importante de la campagne de l’impérialisme américain visant à maintenir sa domination mondiale par le biais d’une guerre mondiale. Les fronts de cette guerre peuvent déjà être identifiés: en Ukraine, contre la Russie; au Moyen-Orient contre l’Iran et ses alliés, y compris le Hezbollah au Liban et le Hamas à Gaza; et dans la vaste région Indo-Pacifique contre la Chine.

La grande majorité des travailleurs et des jeunes du monde entier, qui sont horrifiés par le génocide perpétré par Israël contre la population de Gaza, sont favorables à un cessez-le-feu. Des millions de personnes de toutes les ethnies, religions et nationalités, y compris des Juifs du monde entier, ont participé à des manifestations mondiales de masse contre le génocide.

Au cours des deux derniers mois, Israël a tué 17.997 habitants de Gaza et 7.760 personnes sont portées disparues. Cela signifie que, selon un décompte réaliste, le nombre de morts s’élève désormais à près de 25.000, dont une grande majorité de femmes et d’enfants.

Le vote a suivi l’invocation d’urgence de l’article 99 par le secrétaire général des Nations unies, António Guterres, qui a expliqué que l’ensemble du système de santé à Gaza s’était effondré et que la population se trouvait face à la famine, à la déshydratation et à des maladies endémiques.

António Guterres a mis en garde contre «l’absence de protection efficace des civils» par l’armée israélienne, ajoutant que «les hôpitaux se sont transformés en champs de bataille». Il a ajouté: «Il n’y a aucun lieu sûr à Gaza».

Il a prévenu: «Au milieu des bombardements constants des forces de défense israélienne et sans abris ni éléments essentiels pour survivre, même une aide humanitaire limitée» deviendra «impossible».

Il a ajouté: «Nous sommes tout simplement incapables d’atteindre les personnes dans le besoin à l’intérieur de Gaza. Nous sommes confrontés à un risque grave d’effondrement du système humanitaire».

Et de conclure: «Il y a urgence. La population civile doit être épargnée. Avec un cessez-le-feu humanitaire, les moyens de survie peuvent être rétablis et l’aide humanitaire peut être acheminée en toute sécurité et en temps voulu dans toute la bande de Gaza».

Expliquant le vote des États-Unis, l’ambassadeur américain Robert Wood a déclaré que tout «cessez-le-feu» sans la destruction totale de la résistance palestinienne était inacceptable pour les États-Unis.

Il a déclaré: «Nous ne soutenons pas l’appel de cette résolution en faveur d’un cessez-le-feu insoutenable qui ne fera que semer les graines de la prochaine guerre». Il a ajouté: «Tout cessez-le-feu qui laisserait le Hamas diriger la bande de Gaza» est inacceptable pour les États-Unis.

Ces déclarations sont extraordinaires. Lorsque le Premier ministre israélien fasciste Netanyahou parle du «Hamas», il ne parle pas d’une organisation politique mais de toute volonté de résistance de la part de la population palestinienne. Dans cette logique, la seule façon de mettre fin à la guerre est de massacrer ou de procéder à un nettoyage ethnique de l’ensemble de la population de Gaza, qui est maintenue illégalement emprisonnée sur un territoire illégalement occupé par Israël.

En défendant le veto américain à la résolution, Wood a critiqué le projet pour sa formulation qui «ne reconnaît pas qu’Israël a le droit de se défendre contre le terrorisme, conformément au droit international. Il s’agit d’un droit auquel tous les États peuvent prétendre».

En effet, la résolution n’affirme pas un tel «droit», car il n’existe pas. Comme l’a expliqué Francesca Albanese, rapporteur spécial des Nations unies sur les droits de l’homme dans les territoires palestiniens occupés, le mois dernier, «le droit à l’autodéfense peut être invoqué lorsque l’État est menacé par un autre État, ce qui n’est pas le cas».

Elle a continué: «On ne peut pas revendiquer le droit à l’autodéfense contre une menace émanant d’un territoire qu’on occupe, d’un territoire maintenu sous occupation belligérante», a-t-elle poursuivi.

En déclarant le «droit» d’Israël à «se défendre» contre une population emprisonnée, les États-Unis soutiennent non seulement l’occupation israélienne illégale de Gaza et de la Cisjordanie, mais aussi le «droit» d’Israël à punir collectivement la population civile par des massacres et un nettoyage ethnique en réponse à tout acte de résistance à cette occupation.

Le secrétaire d’État américain, Antony Blinken, a déclaré dimanche à la chaîne ABC: «Un cessez-le-feu en ce moment, alors que le Hamas est toujours en vie, toujours intact, et avec l’intention déclarée de répéter le 7 octobre encore et encore et encore, ne ferait que perpétuer le problème».

Le sénateur Bernie Sanders s’est fait l’écho de ce point de vue en déclarant: «Je ne sais pas comment on peut avoir un cessez-le-feu permanent avec le Hamas, qui a déclaré avant et après le 7 octobre qu’il voulait détruire Israël, qu’il voulait une guerre permanente. Je ne sais pas comment on peut avoir un cessez-le-feu permanent avec une telle attitude».

Ces déclarations, tant de la part de Sanders que de Blinken, témoignent de l’état d’esprit génocidaire qui s’est installé dans la classe dirigeante américaine. Dans la mesure où les Palestiniens s’opposent à l’existence de l’État d’Israël, ils peuvent à juste titre être massacrés.

Mais où s’arrête cette doctrine? Si des personnes s’opposent à l’existence des États capitalistes, ces États, dont l’existence est menacée, ont-ils le droit de tuer tous leurs opposants? Le gouvernement Biden, consciemment et délibérément, fait du meurtre de masse une politique d’État et crée un précédent pour des crimes encore plus graves, à l’étranger et dans son propre pays.

Le génocide de Gaza marque une nouvelle étape dans la criminalisation de la politique étrangère impérialiste. Confrontées à une crise sociale, économique et politique à laquelle elles n’ont pas de solution, les classes dirigeantes capitalistes abandonnent toute retenue et adoptent ouvertement le génocide comme politique d’État.

Des millions de personnes ont participé aux manifestations contre la guerre menée par Israël contre la population de Gaza. Mais les États-Unis et leurs partenaires impérialistes ont clairement montré qu’ils étaient totalement indifférents aux sentiments des masses de leur propre population. C’est pourquoi la lutte pour mettre fin au génocide israélien à Gaza doit être menée comme une lutte contre les gouvernements impérialistes du monde entier, qui l’arment et le rendent possible.

Et parce que Gaza n’est qu’un des fronts de l’éruption mondiale du militarisme impérialiste, la lutte doit être internationale et unir les travailleurs de tous les continents dans un combat commun contre la guerre impérialiste et le système capitaliste qui en est à l’origine. Cela signifie une lutte pour la transformation socialiste de la société par la construction d’un mouvement révolutionnaire de masse de la classe ouvrière.

(Article paru en anglais le 11 décembre 2023)

Source : WSWS
https://www.wsws.org/fr/…