Par l’Observatoire des multinationales

Après avoir montré que 100% du CAC40 bénéficie d’aides publiques et qu’il verse de manière agrégée 51 milliards d’euros à ses actionnaires (+22%), soit l’équivalent de 140% de ses profits en 2020, l’Observatoire des multinationales révèle dans un nouveau rapport comment les grands groupes français profitent de l’absence de vraies conditions au soutien apporté par les pouvoirs publics pour supprimer des emplois et sacrifier les besoins du « monde d’après » aux intérêts court-termistes des marchés financiers.

Le gouvernement a débloqué des aides publiques massives pour soutenir le secteur privé face à la crise sanitaire, dont les grandes entreprises du CAC40 ont largement bénéficié. Malgré les demandes qui émanaient de toute part, il s’est obstinément refusé à assujettir ces aides à des véritables conditions sociales, environnementales et fiscales, notamment en matière de versement de dividendes, de protection de l’emploi et de réduction des émissions de gaz à effet de serre.

Le rapport Allô Bercy ? Pas d’aides publiques aux grandes entreprises sans conditions, que nous publions dans le cadre de notre campagne de financement participatif #AlloBercy, dresse le tableau – malheureusement peu réjouissant – des conséquences de ce refus.

En voici les principaux enseignements :

Des aides publiques massives qui profitent aux très grandes entreprises

  • 100% du CAC40 a bénéficié d’aides publiques massives à l’occasion de la crise du Covid-19 – y compris certains groupes qui persistent à prétendre le contraire.
  • La France a consacré 155 milliards d’euros supplémentaires, s’ajoutant aux aides déjà existantes de l’ordre de 150 milliards, à soutenir les entreprises en 2020. C’est le record en Europe.
  • La transparence sur ces aides publiques est très limitée, de sorte qu’il est impossible de dire combien exactement chaque groupe a reçu.
  • Seulement six groupes du CAC40 affichent une perte pour 2020. Dix groupes affichent des profits supérieurs à 2 milliards d’euros, dont certains ont été largement soutenus par les pouvoirs publics.
  • Le CAC40 a déclaré 20 millions d’euros de dépenses de lobbying pour 2020, dont plus d’un tiers pour obtenir des aides publiques ou des dérégulations.

Le CAC40 priorise plus que jamais les dividendes

  • Avant la crise sanitaire, le CAC40 s’apprêtait à verser la somme record de 64,7 milliards d’euros à ses actionnaires. Malgré les appels à la modération, les deux tiers du CAC40 avaient maintenu le versement de leurs dividendes. Ce sont finalement 42 milliards qui avaient été versés aux actionnaires.
  • Un an plus tard, quand bien même l’épidémie n’est pas finie, les dividendes du CAC40 repartent à la hausse, avec près de 51 milliards de versements aux actionnaires.
  • Cela représente presque 140% des bénéfices cumulés du CAC40 en 2020. Autrement dit, le CAC40 a consacré tous ses profits et puisé dans sa trésorerie pour rémunérer ses actionnaires.
  • Le premier bénéficiaire de ces dividendes est BlackRock avec 1,7 milliard d’euros, devant l’État français et le groupe Arnault.
  • La plupart des aides publiques n’ont été assorties d’aucune condition relative au versement de dividendes. 80% des groupes du CAC40 ayant recours au chômage partiel ont versé un dividende en 2020 et/ou 2021.

Les aides publiques ne protègent pas l’emploi

  • Le CAC40 a annoncé 62500 suppressions d’emplois dans le monde depuis le début de la crise sanitaire, dont près de la moitié en France. Une partie de ces suppressions est encore à venir.
  • Si certaines entreprises du secteur numérique ont connu une forte augmentation de leurs effectifs en 2020, la plupart ont supprimé des emplois. 7 groupes du CAC40 ont supprimé plus de 5000 emplois l’année dernière.
  • Certaines des entreprises les plus soutenues (Renault, Air France, Safran) sont aussi celles qui suppriment le plus d’emplois. 7 des 10 des plus gros bénéficiaires de prêts garantis par l’Etat, dont Renault et Air France, ont supprimé des emplois.

Climat, rémunérations patronales, fiscalité : les aides publiques n’ont pas encouragé des pratiques plus vertueuses

  • Le gouvernement a systématiquement opposé son veto à toute forme de condition climatique aux aides aux entreprises, même si certains secteurs particulièrement problématiques (automobile, aérien) ont été au centre de l’attention. Parallèlement, le CAC40 s’est opposé aux changements concrets proposés par la Convention citoyenne pour le climat.
  • Aucune véritable condition n’a été posée en matière d’optimisation fiscale. Certains groupes du CAC40 les plus abreuvés d’argent public sont aussi les plus présents dans les paradis fiscaux.
  • 7 dirigeants du CAC40 ont vu leur rémunération augmenter en 2020 malgré la crise sanitaire. Carlos Tavares (PSA) refuse encore de révéler sa rémunération en 2020. François-Henri Pinault (Kering) cache l’essentiel de sa rémunération (12 millions d’euros) sous prétexte que cette somme est versée en 2021.
  • Au-delà des effets d’annonce du printemps 2020 sur la réduction de leur rémunération par solidarité, les dirigeants du CAC40 n’ont en réalité diminué leur rémunération que de 8% en moyenne. Dix patrons du CAC40 n’ont pris aucune initiative de réduction de leur rémunération.

– Lire le rapport Allô Bercy ? Pas d’aides publiques aux grandes entreprises sans conditions

Source : Observatoire des multinationales
https://multinationales.org/…