Vidéoconférence du 10 décembre 2025 sur la vente des terres rares ukrainiennes.
Par Thierry Meyssan
Les négociations de paix en Ukraine se heurtent à la mauvaise volonté de l’administration Zelensky. Celle-ci tente de gagner du temps, d’abord au plan judiciaire, puis au plan militaire, et enfin, au plan politique. Cependant, les contacts pris laissent à penser ce que sera cette paix.
Cet article fait suite à :
1 – « Les straussiens prennent le contrôle des Nations Unies et de l’OTAN », 7 octobre 2025.
2 – « La propagande anti-Russe et la préparation de la guerre contre la Russie », 28 octobre 2025.
3 – « Le moment de vérité : l’Occident face aux avancées militaires russes », 4 novembre 2025.
4 – « La chute du régime de Zelensky et celle de ses alliés », 25 novembre 2025.
5 – « Qu’est-ce qui se cache derrière les négociations de paix pour l’Ukraine ? », 2 décembre 2025.
Les négociations de paix entre l’Ukraine et la Russie trainent en longueur. À l’évidence, la partie russe, sûre de sa victoire, entend libérer au plus tôt ce qui reste du Donbass, tandis que la partie ukrainienne ne veut rien lâcher.
Les Européens de l’UE et du Royaume-Uni multiplient les réunions, au rythme de presque une par jour, avec la seule obsession de poursuivre la guerre, avec ou sans les États-Unis.
Deux nouveaux évènements ont modifié la donne : Washington envisage de quitter l’OTAN et les Ukrainiens acceptent l’idée de vendre leur pays.
Washington et l’OTAN
Le 1er décembre, s’est tenue une vidéoconférence secrète à laquelle ont participé
les présidents français (Emmanuel Macron) et finlandais (Alexander Stubb), le chancelier allemand (Friedrich Merz), les Premiers ministres polonais (Donald Tusk), italien (Giorgia Meloni), danois (Mette Frederiksen) et norvégien (Jonas Gahr Støre), le secrétaire général de l’OTAN (Mark Rutte), la présidente de la Commission européenne (Ursula von der Leyen) et le président du Conseil européen (António Costa).
Selon le Spiegel, qui a pu avoir accès au compte rendu de la réunion, le secrétaire général de l’OTAN y a déclaré qu’il était d’accord avec le président finnois et que les Européens devaient se méfier de la paix en Ukraine que les envoyés spéciaux du président Donald Trump, Steve Witkoff et Jared Kushner, étaient en train de négocier [1].
C’est la première fois qu’un secrétaire général de l’OTAN en exercice se permet de critiquer ouvertement un président des États-Unis également en exercice.
La Stratégie de Sécurité Nationale, publiée le 4 décembre par la Maison-Blanche, cite cinq fois l’OTAN. Cependant, ce n’est plus une alliance essentielle aux États-Unis dans la mesure où le président Trump a sonné la fin de « l’Empire américain ». Washington est trop occupé par ses 33 000 milliards de dettes pour se consacrer encore à la défense de l’Europe de l’Ouest. Ce texte se contente donc de noter que les États membres de l’alliance atlantique devront assurer eux-mêmes leur sécurité en y consacrant 5 % de leur produit intérieur brut (PIB) très loin de ce qu’ils font aujourd’hui. Il note aussi que l’alliance n’est pas vouée à poursuivre son extension [2].
Le 9 décembre, cinq jours plus tard, un représentant républicain, Thomas Massie (Kentucky), a déposé un projet de loi (HR 6508) visant au retrait des États-Unis de l’OTAN. Ce texte a été transmis, le 12 décembre, à la commission des Affaires étrangères [3]. C’est la première fois que ce sujet sera traité au Congrès.
Il est trop tôt pour conclure quoi que ce soit, mais d’ores et déjà nous devons constater qu’il existe un courant opposé à l’alliance atlantique au sein des trumpistes et que les États européens ont conscience qu’ils ne parviendront pas eux-mêmes à assurer à la fois leur propre défense nationale et à attaquer la Fédération de Russie.
En privé, les collaborateurs du président Trump assurent que celui-ci sortira de l’alliance à la mi-2027 ; une échéance qui peut être hâtée.
Les dirigeants de l’Union européenne en sont bien conscients. Le président du Conseil de l’Union, António Costa, déclarait, le 8 décembre, devant l’Institut Jacques Delors : « Si nous voulons nous protéger, non seulement contre nos adversaires, mais aussi contre les alliés qui nous défient, il nous faut renforcer l’Europe. Nous avons besoin de nous concerter pour bâtir une Europe qui doit comprendre que les relations des alliés et les alliances d’après la Deuxième Guerre mondiale ont changé. »
Certes, mais les membres de l’UE n’ont absolument pas les moyens des États-Unis. Ils ne peuvent pas assurer seuls leur propre défense. Au demeurant, s’ils le souhaitaient, ils devraient s’organiser autour d’une des trois puissances nucléaires de leur région : la France, le Royaume-Uni ou… la Russie.
Le dictateur Zelensky et les élections
Il y a maintenant un mois, le 11 novembre, Marco Rubio, secrétaire d’État, a donné le signal de « l’opération Midas ». Les principaux alliés du président non-élu ukrainien, Volodymyr Zelensky, sont tombés, un à un. Il est impensable qu’il ne soit pas l’un des principaux bénéficiaires des détournements de fonds de l’Ukraine et du racket des entreprises ukrainiennes. Pourtant personne n’ose l’arrêter. À l’évidence, il tente de se maintenir pour sécuriser ses gains ou les transférer à l’étranger.
Il a d’abord battu le rappel des soutiens de l’Ukraine, multipliant les réunions à Athènes, Paris, Londres, Bruxelles, Rome et Berlin, pendant que son représentant spécial et le secrétaire général de son Conseil de Défense, Rustem Umerov, est déjà en fuite. Le Pouvoir en Ukraine n’est donc plus qu’un jeu d’ombres : le président non-élu peut à tout instant tomber et son principal négociateur ne peut déjà plus retourner dans sa patrie.
Dans un entretien à Politico, le 9 décembre [4], le président Trump a tenu ce discours :
Dasha Burns : Est-il temps pour l’Ukraine d’organiser une élection, pensez-vous ?
Donald Trump : Oui. Je pense que oui. Ça fait longtemps. C’est, euh… ça ne s’est pas particulièrement bien passé. Oui, je crois qu’il est temps. Je pense que c’est un moment important pour organiser des élections. Ils utilisent la guerre non pas pour organiser une élection, mais, euh, je pense que le peuple ukrainien devrait … devrait avoir ce choix. Et peut-être que Zelensky gagnerait. Je ne sais pas qui gagnerait. Mais ils n’ont pas eu d’élection depuis longtemps. Vous savez, Ils parlent d’une démocratie, mais cela arrive à un point où ce n’est plus une démocratie.
Le président non-élu, lui a immédiatement répondu : « Je suis prêt pour des élections. Je demande maintenant, je le déclare ouvertement, aux États-Unis de m’aider, éventuellement avec les collègues européens, à garantir la sécurité pour la tenue d’élections. »
Il faut savoir que la Constitution ukrainienne interdit des élections en période de loi martiale. Or la loi martiale a été instaurée, une première fois, en 2018, par le président Petro Poroschenko, pendant la campagne de l’élection présidentielle [5].
Puis, une seconde fois, par le président Volodymyr Zelensky, en 2022, lors de l’opération militaire spéciale russe.
La loi martiale institue neuf mesures :
Restrictions aux droits et libertés constitutionnels des civils ;
Introduction d’une « obligation de travailler », qui s’applique à tous, qu’il exerce ou non un emploi, et qui peut être au sein de l’armée ;
Saisie de propriétés appartenant à l’État, ou « disposer de force » de biens communaux et privés « pour les besoins de l’État » ;
Introduction d’un couvre-feu ;
Introduction de points de contrôle militaires et de restrictions de « la liberté de circulation des citoyens, des étrangers et des apatrides, ainsi que la circulation des véhicules » ;
Vérification des documents des individus et inspection des lieux où ils se trouvent ;
Interdiction de manifestations pacifiques, de rassemblements et d’événements de masse ;
Interdiction ou restrictions de médias ;
Interdiction ou restrictions du transfert d’informations sur les réseaux sociaux.
Dans les deux cas, il s’agissait clairement d’instaurer un régime autoritaire. Si Porochenko ne l’a appliquée que trente jours, Zelensky l’a reconduite tous les trois mois depuis février 2022. Selon le seizième décret présidentiel en la matière qu’il a promulgué, elle est prolongée jusqu’en février prochain.
Selon la Constitution, le mandat de Volodymyr Zelensky a expiré en mai 2024. Depuis cette date, c’est le président de la Verkhovna Rada, Rouslan Stefantchouk, qui devrait assurer l’intérim. Non seulement, il ne l’a pas demandé, mais il a accompagné le président sortant dans ses premiers déplacements pour affirmer sa légitimité.
S’il y avait des élections aujourd’hui, les listes électorales seraient faussées, car des centaines de milliers de soldats morts au combat y figurent encore. Dans ces conditions, il serait enfantin pour le Pouvoir de truquer les urnes.
La partie russe a, de très nombreuses fois, souligné qu’elle ne pouvait pas signer de paix avec une personnalité illégitime. Elle se souvient que le président Poroshenko avait considéré, du jour au lendemain, que les accords de Minsk, signés par son envoyé spécial et prédécesseur, Leonid Koutchma, étaient nuls et non-avenus car ce haut-personnage n’avait été ni validé par lui, ni par la Verkhovna Rada.
L’annonce par le président ukrainien, désormais non-élu, qu’il accepterait de procéder à des élections n’est donc probablement qu’un moyen de gagner du temps et de repousser encore un peu plus la paix.
Vente de l’Ukraine au plus offrant
Le sénateur républicain, Lindsey Graham (Caroline du Sud), avait évalué la valeur des terres rares ukrainiennes, le 9 juin 2024 lors d’une interview à « Face the nation » (CBSNews), entre « 10 000 et 12 000 milliards de dollars ».
Le président Trump avait évoqué, il y a quelques mois, la possibilité de leur transfert aux États-Unis pour rembourser ce que la guerre leur a coûté. Le secrétaire US au Trésor, Scott Bessent, s’était rendu à Kiev, le 12 février, pour en discuter avec le président Zelensky.
Aussi, le président non-élu, Volodymyr Zelensky, a-t-il réuni par visioconférence, le 10 décembre, le même Scott Bessent, avec Jared Kushner, non pas en tant que négociateur à Moscou, mais en tant que directeur du fonds Affinity Partners, et Larry Fink, directeur du fonds BlackRock et déjà propriétaire d’une grande partie des terres agricoles [6]. Il s’agissait à l’évidence d’évaluer ce qui pourrait être acheté en échange des terres rares. Ce qui était impensable, il y a dix mois, est devenu soudain possible.
Une seconde réunion, s’est tenue le lendemain 11 décembre. Le président non-élu Zelensky a réuni les principaux négociateurs états-uniens et a fait intervenir le secrétaire général de l’OTAN. Il s’agissait de passer en revue les garanties de sécurité, sachant que l’OTAN n’est plus éternelle.
[1] « We Must Not Leave Ukraine and Volodymyr Alone with These Guys », Matthias Gebauer, Leo Klimm, Paul-Anton Krüger, Timo Lehmann, Fedir Petrov, Jan Petter, Fidelius Schmid & Michael Weiss, Der Spiegel, December 4, 2025.
[2] « Le Pentagone adopte la vision Trump du monde », par Thierry Meyssan, Réseau Voltaire, 10 décembre 2025.
[3] « To require the President to give notice of denunciation of the North Atlantic Treaty for purposes of withdrawing the United States from the North Atlantic Treaty Organization, and for other purposes », Thomas Massie, House of représentatives 6508, December 9, 2025.
[4] « Donald Trump in The Conversation », Dasha Burn, Politico, YouTube, December 9, 2025.
[5] « L’Ukraine adopte une loi martiale aux visées très électorales », Stéphane Siohan, Le Temps, 27 novembre 2018.
[6] « Une « paix financière khazare » en Ukraine : BlackRock et le désastre Zelensky », par Alfredo Jalife-Rahme, Traduction Maria Poumier, La Jornada (Mexique) , Réseau Voltaire, 15 décembre 2025.
Source : Réseau Voltaire
https://www.voltairenet.org/…
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