Par Patrick Martin

La semaine commence avec l’intensification par Israël de sa campagne génocidaire contre la population de Gaza, tant à Rafah, la seule partie inoccupée de l’enclave, que dans l’ensemble de la bande de Gaza.

Une catastrophe aux proportions monumentales se déroule dans le sud de la bande de Gaza. Au cours du week-end, 300.000 Palestiniens supplémentaires ont été contraints de fuir Rafah alors que les Forces de défense israéliennes entament leur assaut final dans le sud de la bande de Gaza, bombardant les quartiers et déployant des troupes et des chars sur place. Les FDI les dirigent vers la zone de Mawasi, à l’extrême sud-ouest du territoire, où ils seront piégés entre les forces israéliennes, la frontière égyptienne et la mer Méditerranée – effectivement confinés dans une prison à ciel ouvert, sans abri, sans approvisionnement en nourriture et en eau, ou sans protection contre les bombes et les missiles israéliens.

Dimanche, les chars israéliens ont pénétré à nouveau dans le camp de réfugiés de Jabalia, dans le nord de la bande de Gaza, qui comptait plus de 100.000 habitants avant la guerre, sous prétexte que le Hamas, le parti palestinien au pouvoir, y reconstruit son réseau politique et militaire. Les autorités gazaouies ont déclaré qu’aucun service médical ni aucune aide humanitaire n’étaient fournis dans toute la moitié nord de la bande de Gaza, qui comprend la ville de Gaza et Jabalia. Les responsables de l’aide humanitaire des Nations unies ont déclaré qu’une famine aiguë sévissait dans toute cette région. Les médias ont rapporté que 200.000 personnes fuyaient les combats dans le nord.

Les puissances impérialistes de l’axe États-Unis-OTAN, et surtout le gouvernement Biden, sont entièrement coupables de cette dernière étape du génocide à Gaza, qui dure depuis sept mois.

Biden tente actuellement de se donner des airs de critique, afin de désamorcer l’opposition massive des étudiants et des travailleurs au génocide israélien. Mais ses «critiques» cyniques et hypocrites n’ont pas eu le moindre effet sur la conduite des opérations militaires israéliennes, et elles ne sont pas censées en avoir.

Même si un certain nombre de démocrates ont exprimé dimanche leur inquiétude face à la catastrophe humanitaire à Gaza, l’essence de la politique américaine dans la région a été résumée par le sénateur républicain Lindsey Graham.

S’exprimant dans le cadre de l’émission «Meet the Press» de la chaîne NBC, Graham a dénoncé les suggestions de son interlocutrice, Kristen Welker, selon lesquelles Biden n’avait retenu que les armes les plus volumineuses, telles que les bombes d’une tonne, qui feraient des milliers de morts parmi les civils si elles étaient utilisées dans un espace à forte concentration de population comme Rafah. Pourquoi Israël ne pourrait-il pas atteindre son objectif avec des armes de précision et tuer moins de personnes, a demandé Welker.

Graham a répondu:

Je pense qu’il est impossible de réduire le nombre de morts civiles à Gaza tant que le Hamas utilisera sa propre population comme bouclier humain […] Écoutez, vous savez, voici ce que je dirais à propos de la lutte contre un ennemi qui veut vous tuer, vous et votre famille. Pourquoi avons-nous largué deux bombes – des bombes nucléaires – sur Hiroshima et Nagasaki? Pour mettre fin à une guerre que nous ne pouvions pas nous permettre de perdre […] lorsque nous étions face à la destruction de notre nation après Pearl Harbor, en combattant les Allemands et les Japonais, nous avons décidé de mettre fin à la guerre en bombardant Hiroshima et Nagasaki avec des armes nucléaires. C’était la bonne décision. Donnons à Israël les bombes dont il a besoin pour mettre fin à la guerre qu’il ne peut se permettre de perdre et travaillons avec lui pour minimiser les pertes.

D’un point de vue historique, le largage de bombes nucléaires sur Hiroshima et Nagasaki par le gouvernement Truman n’était pas nécessaire pour «mettre fin à une guerre». Il s’agissait plutôt de démontrer que l’impérialisme américain était prêt à utiliser des armes nucléaires et de massacrer des dizaines de milliers de civils innocents pour assurer sa domination mondiale.

Graham, se faisant l’écho de déclarations similaires faites par le représentant Tim Walberg il y a cinq semaines, préconise une politique d’assassinat de masse: les Palestiniens qui restent à Gaza devraient tout simplement être tués.

Ce que les médias présentent comme un conflit important au sein de l’establishment politique américain relève tout au plus de considérations tactiques. Le gouvernement Biden continue d’armer et de défendre Israël qui intensifie son assaut génocidaire sur Rafah. Les démocrates et les républicains se sont donné la main le mois dernier pour adopter près de 100 milliards de dollars de financement supplémentaire pour les guerres en Ukraine et à Gaza, ainsi que pour la préparation de la guerre contre la Chine. Et ils sont unis dans la répression des manifestations contre le génocide aux États-Unis.

Des personnalités comme le sénateur Bernie Sanders, (un démocrate soi-disant de gauche) qui a également participé à l’émission «Meet the Press», jouent un rôle particulièrement cynique. Il a déclaré à Welker qu’il appuyait une coupure de l’aide militaire américaine à Israël.

Sanders, cependant, n’a rien dit sur Biden et sur le rôle des États-Unis en tant que principal complice du génocide à Gaza. Cette omission est délibérée. Sanders est l’un des principaux partisans de Biden et l’un de ses porte-parole dans la campagne électorale, présentant sa réélection comme essentielle à la préservation de la démocratie américaine.

Interrogé par Welker sur son commentaire du début de la semaine, selon lequel Gaza risquait de devenir le Vietnam de Biden, Sanders a répondu: «Ce qui m’inquiète, c’est que cette guerre à Gaza n’est pas seulement fortement contestée par les jeunes, mais aussi par un grand nombre de personnes de la base démocrate.»

Ça ne pourrait être plus clair. Sanders a modifié sa position publique, émettant quelques critiques sur la guerre, afin de protéger la campagne de réélection de Biden et de détourner l’opposition populaire massive au génocide de Gaza dans une impasse.

Dans une vidéo publiée la semaine dernière, le candidat à la présidence du Parti de l’égalité socialiste, Joseph Kishore, a déclaré: «Lors des élections présidentielles de 2024, ça ne veut rien dire de parler d’un “moindre mal” dans le conflit entre Biden et Trump, entre les démocrates et les républicains.»

C’est une conclusion politique qui doit être tirée par les travailleurs et les jeunes opposés au génocide à Gaza. La question critique est l’intervention indépendante de la classe ouvrière dans la lutte contre le génocide, la guerre impérialiste et le système de profit capitaliste.

Le World Socialist Web Site appelle à réagir à l’escalade du génocide à Gaza par une escalade des protestations de masse dans le monde entier. Les travailleurs doivent s’engager dans la lutte contre le génocide qui est mené dans l’intérêt de la même classe dirigeante qui les exploite, par le biais de grèves et d’autres formes de protestation visant à stopper l’envoi d’armes et d’autres biens utilisés par Israël pour mener son assaut sur Rafah.

(Article paru en anglais le 13 mai 2024)

Source : WSWS
https://www.wsws.org/fr/…