Par Alexandre Latsa

Cela fait maintenant 365 jours que la Russie a déclenché son Opération Militaire Spéciale.

Quelques jours plus tard, la communauté d’affaires française, s’était retrouvée dans une soirée organisée par la chambre de commerce et d’industrie franco-russe. Au cours de cette soirée qui s’est tenue dans une ambiance électrique mélange de stress, inquiétude et désarroi, je me rappelle avoir expliqué à un groupe de français assez médusés que je pensais que cette “affaire” allait avoir des conséquences plus importantes pour la planète, et notamment l’hémisphère nord, que la chute de l’URSS.

Le monde d’avant.

Pour beaucoup pourtant, la fin de l’URSS signifiait la fin d’une Histoire avec un grand H et la continuité de l’histoire avec un petit h. La fin des hommes même et l’apparition de l’homme, unique nous disait on puisque l’humanité n’avait plus qu’un modèle et que celui-ci était le meilleur.

La domination du système d’exploitation occidental et américano-centrique s’affirma dans les années 90 et 2000 de façon absolument indiscutable. L’OTAN avant pris trop d’avance technologique sur le plan militaire, et l’Amérique trop d’avance sur le contrôle des flux financiers globaux.

La construction européenne, de son coté, au cours des deux premières décennies du siècle, paracheva le rattachement de l’Europe de l’Ouest, puis du centre, puis de l’est à ce système d’exploitation; ses lignes de codes civilisationnelles, militaires, politiques, financières arrivèrent même jusqu’à Kiev et amenèrent la guerre aux frontières russes, et dans le monde russe de l’ancienne Ukraine.

Certes il y a eu des “moments” qui ont semblé allait à l’encontre du courant, comme l’incroyable printemps de Crimée en 2014 et la victoire russe en Syrie de 2017, des “moments” qui pouvaient laisser penser qu’il pouvait s’agir des prémices d’un nouvel ordre stratégique mondial.

Et puis le 24 février 2022.

Beaucoup (presque tous?) pensaient que ce scénario était improbable,voire impossible. Beaucoup pensait que cela resterait un abcès local, beaucoup se sont dit que ça serait finit rapidement. Nous nous somme tous trompés. La dimension tectonique, systémique, de l’opération Z était telle, que personne ne pouvait sans doute s’en rendre bien compte sur le moment. Un an plus tard, les observateurs avertis commencent sans doute à peine a envisager sa réelle dimension tectonique.

Bien sur pour la Russie, la guerre contre le monde russe a commencé il y a prés de 9 ans, en 2014.
Mais depuis février 2022, cette guerre n’est plus “quelque part en périphérie de la Russie“, la guerre s’est déplacée au sein de la conscience de chaque russe, de chaque habitant du monde russe.

L’Opération Z a plié la conscience des russes, comme les consommateurs d’épice de Dune, plient l’espace temps avec leur esprit.
Le “quelque part” est devenu “c’est chez nous”.
La guerre contre la Russie et le monde russe est devenu la guerre de tous.
Les slogans “Nous” (Мы) et “ensembles” (Вместе) ne sont pas un hasard.

Bien sur, au sein du système d’exploitation Occidental, des anti-virusses puissant fonctionnent activement, qui ont pour fonction de ne pas permettre aux sociétés occidentales et européennes d’avoir accès à un quelconque scénario non issu du système occidental et surtout pas au narratif russe et sa vérité historique.

Malheureusement, s’il y a du reste bien une bataille perdue, pour la Russie, contre l’Occident, c’est celle de l’information.

L’Opération Z a initié une incroyable, et impensable accélération historique, qui est une inversion symétrique de celle que le monde a connu à partir de 1991 avec le puissant flux occidental. L’opération Z a, et aura, l’effet inverse : elle entraînera un puissant reflux de l’influence du système d’exploitation Occidental, et donc de sa sphère d’influence.

La guerre préventive russe est devenue désormais un duel de civilisations.
Un duel d’écosystème et de système d’exploitation entre deux mondes, le monde russe et le monde occidental.
Plus aucun des deux centres de décisions ne peuvent reculer, le duel est existentiel.

L’affrontement de Moscou et Washington est terrible. Les batailles qui se déroulent sur le théâtre d’opérations sont terribles, les films de ces batailles montrent non seulement la dimension absolument hallucinante du conflit, avec ses dizaines de milliers de morts, ses milliers de tanks et autres véhicules militaires détruits, mais aussi par exemple le rôle croissant des drones et surtout, de terribles combats urbains ou de tranchées au corps à corps.

L’armée russe, malgré de terribles erreurs, va à l’encontre de l’histoire telle qu’elle était censée devoir se dérouler, qui devait amener à une configuration de l’espace monde, sans Russie, ou avec une Russie faible.
C’est précisément ce futur que la Russie refuse et, par le biais de l’opération Z, a décidé d’inverser le cours de l’histoire et reprendre son destin en main.

2022 a été une année stressante et difficile pour les russes, pour la Russie elle aura été celle de la survie à l’uppercut économique des sanctions.
Nul doute que 2023 ne soit pas plus simple, et même probablement plus difficile et stressante.

Mais les tendances de fond, tectoniques, initiées par le retour de l’histoire et ce colossal événement géopolitique sont désormais irréversibles. La Russie est prête à assumer la fin de son voyage vers l’ouest et entamer, au travers de la réunification historique du monde russe,”sa grande bifurcation”.

Une bifurcation morale et civilisationnelle totale.

Et ce pour très longtemps.

Source : auteur
https://alexandrelatsa.ru/…