L’avocat belge Pierre Legros. D. R.

Par Mohsen Abdelmoumen

Le Marocgate continue à déployer ses innombrables tentacules, provoquant quasi quotidiennement des ondes de choc dans la société européenne en général et belge en particulier, pour des raisons que nous développerons ci-dessous. Nous apprenons ainsi que des policiers belges de l’Office central pour la répression de la corruption (OCRC) se sont rendus cette semaine au Maroc, accompagnés de la juge d’instruction en charge du dossier et d’un magistrat du parquet fédéral, pour auditionner l’ambassadeur du Maroc en Pologne, à savoir Abderrahim Atmoun, dit «le postier», puisqu’il distribuait des enveloppes bien garnies pour rétribuer les parlementaires européens pour les différents services qu’ils rendaient au Maroc, en favorisant les intérêts de celui-ci au Parlement européen. Les enquêteurs belges ont auditionné plusieurs personnes pendant quatre jours. Des sources bien informées ont révélé que la justice internationale allait bientôt émettre des mandats d’arrêt internationaux contre plusieurs responsables et ambassadeurs marocains.

Il convient de rappeler que ce scandale gigantesque, qui a ébranlé le Parlement européen, a permis aux enquêteurs de mettre la main sur 1,5 million d’euros en espèces dissimulés chez les inculpés dans leurs différents logements. L’ex-présidente du Parlement européen, Eva Kaili, peut se présenter sur tous les plateaux de télévision pour clamer son innocence en disant qu’elle ne savait pas que son appartement contenait 878 000 euros en billets de banque, que son père croyait bien faire en baladant une valise bourrée d’argent, personne ne l’avait torturée l’année dernière lorsqu’elle avait avoué qu’elle avait demandé à son père de «planquer le grisbi», pour reprendre une expression largement répandue dans le milieu des malfrats, dont tous ces gens font désormais partie.

Sur le chapitre de la corruption qui est décidément très fourni ces derniers temps, souvenons-nous que la RTBF, télévision publique belge, dans son émission d’enquête «Investigation» du 6 décembre dernier, posait la question de savoir si la Belgique était sous influence. C’est pire, dirons-nous, car le pays du chocolat, des Schtroumpfs et du Manneken-Pis, n’a plus rien à voir avec celui de Jacques Brel et est incontestablement sous occupation marocaine. En effet, tout son tissu social, politique, médiatique et culturel, mais aussi ses institutions, sont infiltrés directement ou indirectement par le Makhzen. Ainsi, on apprend que même la justice belge est gangrenée, avec la récente révélation qui jette un nouveau pavé dans la mare et qui met en lumière que des avocats belges ont été débauchés par les services secrets marocains. Leur mission était de servir d’observateurs lors du procès des vingt-cinq Sahraouis accusés d’avoir tué onze policiers marocains lors du démantèlement manu militari du camp de Gdeim Izik en novembre 2010, et d’en témoigner que la justice marocaine était un modèle du genre.

Pour rappel, le camp de Gdeim Izik avait été créé le 10 octobre 2010 à une dizaine de kilomètres de Laâyoune par des Sahraouis qui revendiquaient de meilleures conditions en matière d’emploi et de logement, et ce qui avait commencé avec une poignée de militants s’est vite transformé en un camp regroupant près de 20 000 personnes, tant les conditions de vie du peuple sahraoui était et est toujours déplorable sous la botte des occupants marocains. On connaît les méthodes répressives utilisées par les forces marocaines, qui utilisent de faux prétextes à l’encontre du peuple sahraoui – toujours les mêmes, à savoir criminalité et trafic – pour matraquer, lancer des grenades lacrymogènes, utiliser des canons à eau, et tirer sur la foule avec des balles en caoutchouc. Résultat : 11 policiers marocains tués et 36 civils sahraouis, ces derniers comptant pour du beurre puisque les Marocains ne dénombrent que 2 Sahraouis tués. 25 Sahraouis, dont des militants des droits de l’Homme, ont alors été arrêtés et détenus dans des conditions effroyables, avec torture et traitements inhumains, comme le veut la coutume marocaine. C’est ainsi que fonctionne cette «démocratie» tant vantée par ses amis collectionneurs d’enveloppes, dont ces avocats mercenaires.

En 2013, un premier procès avait condamné les 25 Sahraouis à des peines lourdes, allant jusqu’à la perpétuité, mais le jugement avait été cassé en 2016. L’affaire fut reportée en 2017 où un nouveau procès se tint à grands renforts de tapage médiatique à travers les torchons habituels du Makhzen pour célébrer la justice du roi. Bien sûr, aucun média ne parlera jamais des réclamations des avocats de la défense qui n’auront pas le droit de voir leurs clients ni de consulter les dossiers, verront leurs demandes de contre-expertise passées à la trappe et qui, cerise sur le gâteau, seront molestés par les policiers marocains, ce qui leur a fait dire qu’il s’agissait ni plus ni moins d’un simulacre de procès. Mais il s’est trouvé des avocats belges que sont Me Pierre Legros, ex-bâtonnier de l’Ordre français des avocats du barreau de Bruxelles et, par ailleurs, professeur de déontologie à l’Université libre de Bruxelles (!), et accessoirement avocat du prince Laurent, frère du roi Philippe, Me Emmanuel Carlier, Me André Martin Karongozi, et Me Sophie Michez, la plus fervente prosélyte de la cause marocaine, pour trouver que la justice royale avait été bien rendue et qu’ils n’avaient constaté aucune irrégularité. Donc, des détenus sont torturés, empêchés de voir leurs avocats, lesquels n’ont pas accès aux dossiers, et de plus leurs demandes légitimes de contre-expertise sont rejetées sous de fausses allégations, mais tout va très bien, Madame la Marquise, pour ces avocats observateurs, tout s’est déroulé équitablement.

Me Michez est une grande admiratrice de Mohammed VI qui l’a invitée à la fête du Trône en 2019. Une photo la montre assise à la tribune des invités VIP en train de serrer la main du roi du Maroc. Son amitié pour ce dernier la pousse à se montrer très virulente lorsqu’il s’agit de critiquer le Polisario et l’Algérie, comme en témoignent les exemples suivants. Commençons par son compte LinkedIn : «Il est temps que la communauté internationale prenne ses responsabilités et agisse au sein des camps de Tindouf afin de sauver les nombreuses femmes qui subissent quotidiennement des maltraitances et abus sexuels perpétrés par certains membres du Polisario qui restent désespérément impunis.» Me Michez s’est aussi exprimée dans les médias marocains lors d’un symposium auquel elle assistait à Genève, symposium organisé par l’Observatoire international pour la paix, la démocratie et les droits de l’Homme – on connaît la passion de la Suisse pour les droits de l’Homme – et s’est offusquée de la façon dont l’Algérie bafoue le droit des victimes (sic) en parlant du procès qui s’est tenu à Salé. Me Michez pourrait-elle nous nous expliquer ce que l’Algérie vient faire dans ce procès qui a eu lieu près de Rabat au Maroc ?

Dans deux vidéos, on retrouve Me Michez en pleine croisade sur un média marocain où elle prétend avoir acquis une certaine expérience concernant le Sahara Occidental, alors qu’elle n’y a jamais mis les pieds et se présente comme celle qui est intervenue à l’ONU pour dénoncer le détournement des aides humanitaires attribuées au camp de réfugiés sahraouis à Tindouf, dont elle n’a jamais foulé le sol. Autrement dit, Me Michez s’est rendue à New York avec l’argent du Makhzen pour intercéder en faveur du Maroc en déblatérant le Front Polisario et l’Algérie.

Si son «expérience» du dossier du Sahara Occidental se résume à ce que lui raconte son employeur Hammouchi, par contre, ce que Maître Sophie Michez connaît très bien pour y faire de nombreux séjours, ce sont les palaces 5 étoiles marocains. On en voit des photos sur son compte Facebook, ainsi que du drapeau marocain. Que ne ferait-on pas pour des vacances exotiques tous frais payés ? Sans parler des enveloppes voyageuses. Il suffit de consulter son compte Facebook pour constater la façon dont elle dépense l’argent du Makhzen marocain.

Il faut ajouter que cette personne s’est également présentée sur la liste du Mouvement réformateur dans la commune de Forest à Bruxelles. Nous ne doutons pas qu’elle doit être très proche de Latifa Aïd-Baala, puisqu’elles sont du même parti et qu’elles mangent toutes deux au même râtelier.

Deux autres avocats sont impliqués dans cette sombre histoire de corruption et de vacances luxueuses au Maroc : Emmanuel Carlier et André Martin Karongozi, des avocats indignes du serment qu’ils ont prêté et dont la toge est rouge du sang du peuple sahraoui spolié de son territoire, car c’est bien l’argent issu des richesses du territoire sahraoui qui leur offre cadeaux, enveloppes et séjours dans les grands hôtels. Quant à Me Pierre Legros, qui enseigne la déontologie à l’Université libre de Bruxelles, ses étudiants devraient s’inquiéter de la qualité de l’enseignement qu’il leur prodigue. On ne peut pas enseigner d’un côté ce que l’on ne respecte pas de l’autre.

Ces avocats mercenaires qui défendent l’occupation du territoire sahraoui par le Maroc, au mépris du droit international par intérêt sordide, pourraient tout aussi bien défendre l’occupation de la Palestine par l’entité sioniste et ses crimes. Le colonialisme présente partout la même face hideuse, que ce soit en Palestine et au Sahara Occidental, et certains partis qui se prétendent de gauche et qui défendent la cause du peuple palestinien sans jamais parler du peuple sahraoui, sont dans l’électoralisme et craignent de choquer leur électorat marocain. Ce qui revient à dire que ces partis qui brandissent le keffieh et pleurent pour la Palestine se nourrissent du sang des Palestiniens pour des raisons électorales. Plus précisément, y a-t-il jamais eu une commission d’enquête réclamée par les partis politiques au Parlement belge pour demander des comptes aux députés qui sont compromis dans des affaires de corruption avec le Maroc ? Jamais !

Rappelons pour la énième fois que tout Marocain établi à l’étranger et ayant acquis une nouvelle nationalité, conserve sa nationalité d’origine, qu’il transmet à ses enfants, même si ceux-ci sont nés d’un mariage mixte, et que tout le monde est obligé de prêter serment d’allégeance au roi du Maroc, ce qui place toute la famille sous le contrôle direct du Makhzen. Ce qui revient à dire que tout élu belge d’origine marocaine est avant tout sujet du roi du Maroc. Et ceux-ci figurent pratiquement dans toutes les listes électorales, sauf certains très rares partis. Par exemple, le PS présente en tête de liste à Bruxelles Ahmed Laaouej, l’actuel bourgmestre de Koekelberg, commune de Bruxelles, et destiné à être le futur ministre président de la Région Bruxelles-Capitale en remplacement de Rudi Vervoort. L’épouse de ce dernier, Nadia Badri, socialiste comme son mari, est échevine de la commune de Koekelberg et a occupé six mandats en 2021 pour des rémunérations comprises entre 12.106,00 et 59.550,00 euros brut par mois.. C’est un exemple parmi tant d’autres.

Aucun scandale ne les décourage. Ils continuent à s’immiscer partout. Malgré le scandale du Marocgate qui a montré la corruption structurelle et généralisée, les élus belgo-marocains et blanc-bleu-belges pointés dans les enquêtes, se portent candidats aux prochaines élections qui se dérouleront le 9 juin 2024. Verrons-nous Latifa Aït Baala ou Hugues Bayet sur les listes électorales ? Sans doute pour échapper à la justice en tablant sur l’immunité parlementaire

Une question nous taraude : un Belge pourrait-il faire de la politique au Maroc en se présentant aux élections pour servir les intérêts de la Belgique, au détriment de son propre pays ?

L’avenir nous montrera qu’il n’y a pas que des politiciens et des avocats qui sont achetés par le Maroc, mais ce sera l’objet d’un autre article. Nous poursuivrons nos investigations. En attendant, nous invitons nos lecteurs à préparer les popcorns et le soda, à s’installer confortablement en attendant la suite et à se préparer à voir tous ces responsables marocains embarqués dans le panier à salade pour un long séjour en prison. Rappelons que Mansouri et Hammouchi ont un mandat d’arrêt à leurs guêtres. Et ce n’est qu’un début.

Au suivant !

Mohsen Abdelmoumen

Source : auteur
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