Par Karine Bechet-Golovko

La Lettonie suspend pour un an la diffusion des chaînes russes RTR et l’on n’en trouve pas un mot dans les médias. Il est vrai que depuis 2015, lorsque la même décision avait été prise pour trois mois, l’UE avait validé le formatage du discours à chaque fois, n’y voyant aucune incompatibilité avec les normes européennes. En effet, si la censure est légalisée, pourquoi les médias prendraient-ils des risques en défendant la liberté d’information ? Ils pourraient attirer les foudres du monde global, pour cela, il faudrait un minimum de conviction – c’est dépassé. Un monde, une information. Ce sont les nouvelles valeurs « post-européennes », après que l’UE ait dévoré l’Europe.

La Lettonie vient de suspendre pour un an la diffusion des chaînes russes RTR. L’information est plus que discrète, puisque les médias n’en parlent pas. Manifestement, la liberté d’expression et d’information ne les concerne pas, ils doivent considérer avoir une autre mission …

Pour sa part, le ministère russe des Affaires étrangères a officiellement considéré comme « une démarche politique » cette décision du Conseil national des médias numériques, fondée sur les discours diffusés lors du show politique 60 minutes, qui enjoindrait à la haine et ressortirait de la diffamation. Pour le ministère russe, il est étrange qu’un débat télévisé soit mis en cause, puisque l’intérêt de ces émissions est bien dans la confrontation des points de vue, ce qui, par ailleurs, est au fondement de toute société démocratique.

Si la qualité des débats dans ces émissions laisse effectivement à désirer, le bruit remplaçant souvent le fond, le caractère politiquement engagé de la suspension des chaînes russe par la Lettonie laisse peu de doute. Si l’on en arrive à fermer les médias, qui diffusent un discours non-alignés, l’on ne peut plus revendiquer des valeurs libérales, qui normalement sont au fondement de la culture européenne.

L’on retrouve d’ailleurs dans la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, reprenant l’article 10 de la Convention européenne des droits de l’homme, cet article 11 intitulé « Liberté d’expression et d’information » selon lequel : 

1. Toute personne a droit à la liberté d’expression. Ce droit comprend la liberté d’opinion et la liberté de recevoir ou de communiquer des informations ou des idées sans qu’il puisse y avoir ingérence d’autorités publiques et sans considération de frontières.

2. La liberté des médias et leur pluralisme sont respectés.

Or, en 2019, la Lettonie avait déjà suspendu, pour trois mois cette fois, les chaînes russes et la Commission européenne n’y avait rien trouvé à redire : pas de violation des normes européennes, les mesures prises sont proportionnelles et justifiées. A l’époque, la Lettonie reprochait aux médias russes de diffuser un discours militarisé, qui emportait l’incitation à l’occupation des pays voisins. Et l’UE a validé cela sans broncher. Comme elle l’a fait en 2015, 201è et 2018 … contre la chaîne RTR-Planeta. 

En légitimant une censure ouverte, non seulement l’UE trahit les valeurs européennes, mais se met au service d’une logique totalitaire, visant à normer le discours acceptable et ainsi à tenter de formater la vision du monde, puisque la capacité de penser le monde dépend des informations qui sont accessibles  et compréhensibles par chacun. Une fois de plus, nous voyons bien que l’Union européenne n’a rien à voir avec l’Europe.

Source : Russie politics
http://russiepolitics.blogspot.com/…