Les Palestiniens observent les destructions après une frappe israélienne à Rafah, dans le sud de la bande de Gaza, le mercredi 3 janvier 2024. [AP Photo/Fatima Shbair]

Par Andre Damon

Le New York Times a rapporté mardi qu’Israël avait l’intention de démolir entièrement tous les bâtiments situés dans une «zone tampon» de 1.000 mètres le long de la frontière entre Gaza et Israël, citant des responsables israéliens.

Cette mesure, qui constitue un crime de guerre au regard du droit international, réduirait considérablement la taille de la bande de Gaza.

Ce plan a été révélé après que 24 soldats israéliens ont été tués lundi alors qu’ils posaient des explosifs dans un bâtiment de la zone à démolir. Alors qu’ils le faisaient, ils ont été attaqués par des combattants du Hamas, ce qui a provoqué l’explosion de ces explosifs au cours de la fusillade.

Le Times écrit qu’«Israël veut démolir de nombreux bâtiments palestiniens proches de la frontière afin de créer ce qu’ils décrivent comme une “zone de sécurité”, selon les trois responsables».

Le Times rapporte encore que «deux des responsables ont déclaré que l’objectif d’Israël était de créer une zone tampon allant jusqu’à environ six dixièmes de mile [près d’un km] sur toute la longueur de la frontière israélienne d’environ 58 kilomètres avec Gaza. À son point le plus étroit, le territoire fait moins de quatre miles [6,4 km] de large».

Lors d’une conférence de presse, le porte-parole militaire israélien, le contre-amiral Daniel Hagari, a déclaré qu’Israël cherchait à «créer les conditions de sécurité nécessaires au retour des habitants du sud dans leurs maisons».

La grande majorité des bâtiments de Gaza ont été endommagés ou détruits depuis qu’Israël a lancé son assaut sur Gaza, qui a fait plus de 25.000 morts et plus de 7.000 disparus.

Interrogé sur ce plan, le rapporteur spécial des Nations unies sur le droit à un logement adéquat, Balakrishnan Rajagopal, a déclaré au Times: «Il n’y a tout simplement aucune disposition dans les conventions de Genève pour ce qu’Israël fait le long de la frontière, qui est une sorte de nettoyage préventif de l’habitat».

«Israël, en tant que puissance occupante, a l’obligation de ne pas se livrer à ce qu’on appelle la destruction gratuite de biens», a-t-il poursuivi.

Des politiciens israéliens ont déjà fait allusion au plan d’une telle zone tampon. L’ex-ministre israélien des Affaires étrangères Eli Cohen a ainsi déclaré : «Le territoire de Gaza va aussi diminuer» ; l’ex-ministre de l’Agriculture Avi Dichter a lui, parlé d’une «marge» le long de la frontière. «Peu importe qui vous êtes, vous ne pourrez jamais vous approcher de la frontière israélienne», a-t-il déclaré.

La révélation du plan israélien de réduction du territoire de la bande de Gaza intervenait alors que les Nations unies avertissaient qu’un demi-million d’habitants de la bande de Gaza étaient confrontés à une «famine catastrophique». Juliette Touma, directrice de la communication de l’UNRWA, a déclaré: «Ce ne sont pas là des conditions pour des êtres humains».

L’ONU a noté que «25.000 civils ont été tués, dont 70 pour cent de femmes et d’enfants». Elle a également noté que «1,7 million de personnes ont été déplacées» et que «les infrastructures sanitaires ont été décimées».

Le ministère de la Santé de Gaza a déclaré que 195 Palestiniens avaient été tués entre le 22 et le 23 janvier et que 354 avaient été blessés.

Alors que le président américain Joe Biden prononçait un discours à Manassas, en Virginie, mardi, il a été interrompu par des manifestants qui l’ont surnommé «Joe le génocidaire». L’un des manifestants a crié: «Arrêtez de financer le génocide. Cessez-le-feu maintenant».

Dans une déclaration publiée mardi, l’Euro-Med Monitor a accusé Israël d’attaquer et de tuer continuellement les habitants de Gaza qui attendent les camions d’aide. «Alors que la famine s’étend au nord de la bande de Gaza, l’armée israélienne continue de tuer les Palestiniens qui attendent de recevoir de l’aide au sud de la ville de Gaza», a déclaré l’observatoire, «confirmant l’intention d’Israël de mener un génocide contre la population civile de la bande de Gaza depuis le 7 octobre 2023».

L’Euro-Med Monitor a également déclaré:

Ce groupe de défense des droits de l’homme a documenté l’utilisation par l’armée israélienne d’obus d’artillerie contre des centaines de civils affamés qui s’étaient rassemblés sur la route de Salah al-Din, près du rond-point de Koweït, au sud-est de la ville de Gaza, pour attendre des camions de l’ONU transportant une aide limitée, tuant et blessant un certain nombre d’entre eux. L’armée israélienne a utilisé des obus d’artillerie, des munitions réelles et des drones quadrirotor pour attaquer des centaines de civils affamés qui s’étaient rassemblés dans l’espoir de recevoir la maigre aide, comme l’ont rapporté les équipes de terrain d’Euro-Med Monitor.

La déclaration ajoute:

« Israël a non seulement utilisé la famine comme outil de guerre contre les Palestiniens dans le nord de la vallée de Gaza pendant plus de trois mois consécutifs, mais il a encore pris pour cible les habitants de Gaza qui tentaient d’obtenir une partie de l’aide limitée qui commençait à arriver il y a une dizaine de jours, tuant et blessant un grand nombre d’entre eux dans le cadre de sa guerre génocidaire contre les civils de la bande de Gaza ».

Lundi, les Nations Unies ont rapporté que «les forces israéliennes auraient effectué un raid sur l’hôpital Al Kheir dans l’ouest de Khan Younis, ordonnant aux femmes et aux enfants d’évacuer vers Rafah, dans le sud de Gaza, et auraient arrêté le personnel médical». L’Organisation mondiale de la santé s’est déclarée inquiète de ce que l’établissement subissait des incursions militaires et que plusieurs membres du personnel médical aient été arrêtés. La communication avec l’hôpital n’est plus possible».

L’ONU a également noté qu’«en raison des ordres d’évacuation dans les quartiers entourant l’hôpital Nasser et des hostilités continues à proximité de l’hôpital, le ministère de la Santé signale qu’un grand nombre de blessés se trouvent dans l’enceinte de l’hôpital».

Alors que le génocide israélien se poursuit, les États-Unis intensifient leur engagement militaire direct dans une guerre en pleine expansion au Moyen-Orient. Lundi, les États-Unis et le Royaume-Uni ont mené des frappes aériennes contre huit sites au Yémen, qui visaient prétendument des radars, des drones et des sites de missiles.

Le même jour, le ministère américain de la Défense a publié les noms de deux Navy SEALs tués lors d’un raid commando en mer d’Oman, au large des côtes somaliennes.

Mardi, le secrétaire à la Défense Lloyd Austin a déclaré que les États-Unis avaient mené des frappes aériennes contre des «groupes affiliés à l’Iran en Irak». Il a ajouté: «Le président et moi-même n’hésiterons pas à prendre les mesures nécessaires pour défendre [les troupes] ainsi que nos intérêts… Nous sommes tout à fait prêts à prendre d’autres mesures pour protéger notre peuple et nos installations».

(Article paru d’abord en anglais le 24 janvier 2024)

Source : WSWS
https://www.wsws.org/fr/…