Mostefa Terrab, PDG de l’Office chérifien du phosphate. D. R.

Par Mohsen Abdelmoumen

Pendant que Bourita déclare que le partenariat entre le Maroc et les pays tiers se fera désormais à l’aune de leur reconnaissance de la «marocanité» du Sahara et que les pays européens, Espagne en tête, s’aplatissent devant les exigences marocaines, il est utile de rappeler certains faits que nous allons développer dans cet article consacré au pillage du Sahara Occidental par le Makhzen avec la complicité des entreprises étrangères et des pays importateurs des richesses sahraouies exploitées par l’entité coloniale du Maroc. Car l’occupation illégale du territoire sahraoui n’est rien d’autre qu’un exemple de ce que le capitalisme engendre : la recherche du profit et au diable les peuples spoliés.

Rappelons quand même, à toutes fins utiles, qu’en 1975 la Cour internationale de justice a confirmé qu’il n’y avait pas de lien de souveraineté entre le territoire du Maroc et celui du Sahara Occidental, et que le peuple sahraoui avait droit à l’autodétermination. Ensuite, par cinq arrêts consécutifs, de 2016 à 2021, la Cour de justice de l’Union européenne a conclu que le Maroc n’avait aucune souveraineté sur le Sahara Occidental, ni aucun mandat international pour l’administrer, car le territoire est séparé et distinct du Maroc. En conséquence, la Cour a jugé que les accords UE-Maroc ne pouvaient être licitement étendus au Sahara Occidental, sauf avec le consentement explicite du peuple du territoire – ce dernier point étant le corollaire naturel du droit du peuple du Sahara Occidental à son autodétermination.

En outre, la décision du 29 septembre 2021 a confirmé le statut juridique du Front Polisario en tant que représentant internationalement reconnu du peuple du Sahara Occidental. Mais le Makhzen n’en a cure et se livre au pillage en règle des ressources appartenant au peuple sahraoui, pendant que la communauté internationale regarde ailleurs, à l’exemple de l’ONU qui vient de reconduire pour un an la mission Minurso qui ne sert qu’à permettre au Maroc de s’enraciner plus profondément au Sahara Occidental. L’ONU prouve une fois encore qu’elle n’est plus qu’un organe creux, une girouette aux mains des maîtres marionnettistes. On ne s’étonnera pas que le royaume de Bousbir soit acoquiné avec l’entité sioniste d’Israël. Ce sont deux pays factices créés par des anciennes puissances coloniales, qui se sont inventé une histoire à dormir debout pour justifier leur existence sur un territoire qui ne leur appartient pas. Venus de nulle part, ils ne reconnaissent pas les frontières et rêvent d’expansion, et surtout ils oppriment et spolient les peuples dont ils ont volé la terre.

L’entité coloniale marocaine ne se contente pas de contrôler de grandes réserves de phosphate sur son propre territoire, son appétit vorace l’a poussée à exploiter aussi ce précieux minerai au Sahara Occidental, dépouillant son propriétaire légitime, le peuple sahraoui. Le Groupe OCP, anciennement Office chérifien des phosphates, fondé en 1920 au Maroc et détenu à 95% par la famille royale marocaine, est chargé de l’extraction du minerai et ses tentacules s’étendent à travers un réseau de sociétés partenaires sur les cinq continents, en France, en Allemagne, aux Etats-Unis, en Belgique, etc. Le site web du Groupe OCP a mis le paquet pour se présenter quasi comme une œuvre de bienfaisance en se targuant de participer au bien-être de l’humanité et à la préservation de l’environnement, montrant qu’il mène des activités dans des domaines divers tels que l’éducation, l’environnement, le sport, l’art, etc. pour mieux jeter de la poudre aux yeux de ceux qui voudraient critiquer sa mainmise sur les richesses du Sahara Occidental illégalement occupé. Comme toute société anonyme qui se respecte, ce groupe ne cherche qu’une seule chose : générer des profits, ce qu’il fait puisque son chiffre d’affaires s’élevait à plus de 5.6 milliards dollars en 2018 et 2019. Malheureusement pour lui, un rapport publié en juin 2019 par l’ONG suisse Suissaid a fait état que les deux fabriques d’engrais de l’OCP à Safi et à Jorf Lasfar, sur la côte atlantique marocaine, émettent de grandes quantités de gaz toxiques, polluant l’air et générant des cancers chez les travailleurs et les riverains des mines de phosphate. D’après l’ONG, la pollution de l’OCP affecte également l’agriculture et l’élevage dans les villages autour des sites. Par ailleurs, lorsqu’il vante sa prétendue implication dans le bien-être des populations locales auprès des instances européennes, assurant qu’il fournit de l’emploi, le Makhzen oublie de préciser qu’il engage surtout des ouvriers marocains afin de supplanter les Sahraouis par les colons. Le Makhzen applique ainsi le «grand remplacement» cher à Zemmour et à Le Pen, sur le territoire sahraoui. Le Comité des droits économiques, sociaux et culturels relevant du Haut-Commissariat des droits de l’Homme à l’ONU et le rapporteur de l’ONU sur le droit à l’alimentation avaient tous deux souligné depuis longtemps déjà que les Sahraouis vivaient dans la pauvreté et étaient oubliés dans la redistribution des bénéfices des investissements réalisés sur leurs propres terres. Cela n’a fait que s’aggraver au fil des années.

En 2021, près d’une trentaine de navires ont quitté le territoire sahraoui avec 1 417 000 de tonnes de minerai de phosphate, en nette augmentation par rapport aux années précédentes. Les exportations vers l’Inde, le Mexique et la Nouvelle-Zélande constituent plus de 92% des envois. Les Phosphates de Boucraa SA (Phosboucraa), filiale de l’OCP, exploite la mine de Boukraa, l’une des principales sources de revenus du Maroc au Sahara Occidental, dont la capacité d’extraction est de 4 millions de tonnes de roche phosphatée par an, laquelle est acheminée sur un tapis roulant de 102 km jusqu’à Laâyoune où elle subit divers traitements avant d’être embarquée sur des navires pour l’exportation. La réserve de Boukraa est estimée à 500 millions de tonnes, ce qui promet des bénéfices juteux pour le Groupe OCP qui engraisse la famille royale marocaine au détriment du peuple sahraoui. Il s’avère que le gisement de phosphate de Boukraa est composé de deux couches et d’après le groupe OCP, l’exploitation minière est déjà passée à la deuxième couche qui est de moindre qualité. Le Maroc a donc déjà épuisé la totalité du phosphate de haute qualité, délestant le peuple sahraoui en toute impunité. Toutes les sociétés impliquées dans ce trafic le font au mépris du droit international, et nous employons le terme «trafic» à dessein, car il ne peut être question de commerce lorsque l’on participe à la spoliation des richesses d’un peuple dont le territoire est occupé illégalement par la force des armes.

Voici quelques exemples des importateurs de phosphate en 2021 : Paradeep Phosphates Ltd., coentreprise réunissant la société indienne Zuari Agro Chemicals Limited (ZACL) et le Groupe OCP SA marocain, qui ont transporté vers Paradip en Inde 572 336 tonnes de phosphate sahraoui pour un montant de plus de 141 millions de dollars. Vient ensuite Innophos Holdings Inc., société états-unienne qui a exporté 391 000 tonnes de phosphate sahraoui vers Coatzacoalcos au Mexique pour un montant de plus de 96 millions de dollars. Et puis, il y a Ballance Agri-Nutrients Ltd., une société néozélandaise qui a transporté 292 000 tonnes de phosphate sahraoui vers les ports de Tauranga et Bluff en Nouvelle-Zélande pour près de 72 millions de dollars. Mais il y avait aussi, parmi les importateurs et pour un moindre tonnage, des sociétés chinoise, estonienne et japonaise. Quant aux compagnies maritimes de transport, elles appartiennent à divers pays tels que le Japon, le Royaume-Uni, la Turquie, les Pays-Bas, l’Allemagne, la Grèce, Taïwan, les Etats-Unis, etc. La société germano-espagnole Siemens joue un rôle important dans l’entretien des infrastructures de la mine de Boukraa. Worley, une société d’ingénierie américano-australienne, et la société Caterpillar, fournissent également des services à l’exploitation.

Il apparaît également que l’entité voyou du Maroc accorde des permis d’exploitation de certains sites situés dans le Sahara Occidental à des sociétés étrangères, comme cette petite compagnie australienne Ellipsis Mining récemment enregistrée et qui est dirigée par deux associés inconnus au bataillon : Clayton Cross et John Canaris. Le site de la société présente leur projet «d’exploration de la grande région d’Aghracha, dans le sud du Maroc, à la fois pour le vanadium et les terres rares. La zone totale sous licence est située dans la région du Sahara, à environ 140 km au sud-est de Dakhla. La zone a un grand potentiel en fer (ainsi qu’en titane et en vanadium) et est très avantageuse en raison de sa facilité d’accès et de sa proximité avec les infrastructures de base et les administrations». C’est donc la curée. Le Makhzen ouvre en grand les portes du Sahara Occidental à tout qui veut exploiter les ressources de ce territoire qui regorge de terres rares, minerais, et… pétrole. Contre monnaie sonnante et trébuchante, bien entendu, laquelle atterrira sur les comptes offshores de la famille royale marocaine et des juifs de cours sionistes qui tiennent les rênes du pays.

De plus, afin de solidifier son implantation dans le territoire sahraoui et d’intensifier les «échanges commerciaux» entre les territoires occupés et le reste du monde, le roi du cannabis, de la tomate et du poulpe, Mohamed VI le débauché, a décidé la construction de «Dakhla Atlantique», futur port commercial en eau profonde, érigé sur le site de Ntirift, à une cinquantaine de kilomètres au nord de Dakhla. La principale entreprise impliquée dans la construction du port est Archirodon Group NV, société gréco-néerlandaise, mais d’autres entreprises y participent également comme Eccher/DEAL (Italie), SYSTRA (France), TERRASOL (France), Bygging-Uddemann AB (Suède), Groupe Jan de Nul (Belgique), Kataskevastiki J. Dimitriou Ltd (Grèce), Geotehnika SARL (Maroc), COWI A/S (Danemark), Négri France (France), Groupe Tectone (Maroc), Tecalemit Flexibles (France), Mobilis (France), DV Offshore (France), Daewoo E&C et Korea Port Engineering Corp (Corée du Sud), GM Equipements (Maroc). Tout ce beau monde participe sans état d’âme au pillage du Sahara Occidental par le royaume féodal de Bousbir, en se moquant éperdument du peuple sahraoui laissé sur le carreau. Le peuple sahraoui, dites-vous ? Quel peuple sahraoui ?

Un exemple de ce que le Maroc fait à ce peuple : le doyen de la presse sahraouie, le camarade Mohamed Salem Busaraia, dit «le Docteur», 75 ans, en phase terminale d’un cancer et aveugle, a voulu revenir mourir auprès de sa famille dans sa ville natale à Laâyoune. Il avait fondé la Radio Nationale du Sahara. Après avoir vécu huit ans à Cuba où il était attaché de presse à l’ambassade et correspondant pour l’Amérique latine, lorsqu’il a perdu la vue, il est revenu vivre à Lanzarote, dans les Canaries, où il s’est adapté à son handicap en apprenant le braille et est devenu un conseiller pour les jeunes Sahraouis.

Après avoir été hospitalisé pour son cancer et ayant appris qu’il lui restait peu de temps à vivre, il a voulu dire au revoir à sa famille dans les territoires occupés. Accompagné par un frère et ses enfants, il est arrivé chez sa nièce à Laâyoune où une petite fête avait été préparée pour son retour. Mais ça ne plaisait pas au Makhzen qui a envoyé des forces de sécurité pour expulser le vieux militant après l’avoir forcé manu militari à prendre l’avion seul, aveugle, dans un fauteuil roulant et en phase terminale.

Dès son arrivée à Las Palmas, il a été admis en urgence à l’hôpital universitaire Gran Canaria Doctor Negrin dans un état grave. Voilà comment le Makhzen traite les Sahraouis. Où sont les ONG «droits-de-l’hommiste» ? Où est Reporter sans frontières ? Où est Amnesty International ? Où est Human Right Watch ? Cet homme a voulu revenir mourir dans son pays, dans sa ville natale et auprès des siens, et le Maroc colonisateur l’a expulsé par la force en le molestant alors qu’il est mourant, et en le privant du réconfort de sa famille. Il n’y a rien à attendre de bon de cette engeance. Le Maroc est une voyoucratie qui doit être expulsée du Sahara Occidental par la force du canon et nous encourageons nos frères du Front Polisario à s’inspirer de la lutte d’indépendance du peuple algérien en exportant le combat en territoire ennemi. La Maroc exporte votre phosphate et vos terres rares en Inde, en Nouvelle-Zélande ou au Mexique. Ses troupes kidnappent, tabassent, torturent et font disparaître vos militants. Votre riposte est plus que légitime. Comme l’est aussi la riposte de la résistance palestinienne à l’égard de l’entité sioniste d’Israël.

Quelques petites remarques pour terminer. Quand, pour déblatérer encore et toujours l’Algérie comme chaque jour que Dieu fait, un média du Makhzen fait appel à un pseudo-intellectuel qui se pique d’invoquer les philosophes pour étayer ses propos en citant «Nitch» au lieu de Friedrich Nietzsche et «John Jacques Rousseau» à la place de Jean-Jacques Rousseau, on a bien compris que cet olibrius n’a jamais ouvert un seul ouvrage de ceux auxquels il fait référence. C’est aussi ça le Makhzen : des brutes ignares.

Non, messieurs du Makhzen, détrompez-vous, l’affaire du Sahara n’est pas close. Elle ne le sera jamais tant que le peuple sahraoui ne vous aura pas chassés de son territoire à coups de pieds dans les fesses, comme nous l’avons fait avec le colonisateur français. Vous pouvez essayer de nous agiter l’Iran sous le nez, sachez que l’Algérie est indépendante depuis 1962 et qu’elle n’est sous la domination de personne, contrairement à vous qui rampez devant vos maîtres sionistes et impérialistes, et qui bavez sur les doigts d’un jouisseur dépravé. Vous avez beau descendre la fratrie Azaitar dans vos articles, cela n’empêchera pas le fait que votre roi d’opérette s’envoie en l’air avec ces adeptes du MMA.

Quant au fait que l’Algérie soit alliée avec la Russie, ce n’est pas votre affaire. Chacun ses sympathies.

Mohsen Abdelmoumen

Source : Mohsen Abdelmoumen
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