Par Karine Bechet-Golovko

L’opération militaire russe qui se déroule sur le sol ukrainien s’accompagne d’un combat intérieur, qui prend certes d’autres formes, mais dont les conséquences ne seront pas moins importantes et où la victoire est essentielle pour l’avenir de la Russie et sa victoire géopolitique. Sur le front intérieur, la déglobalisation de la Russie bat son plein. Ce qui en soi marque déjà l’échec du monde global, qui ne peut être global sans la Russie.

Le combat qui se mène sur le territoire ukrainien entre la Russie et le monde atlantiste ayant une dimension géopolitique et idéologique profonde, il ne peut se passer d’un « nettoyage » intérieur, après une vingtaine d’années d’imprégnation néolibérale et globaliste, sans pour l’instant que les élites dirigeantes ne soient directement touchées. Donc sans « coup d’état étatiste ».

Pour autant, ces derniers jours, des décisions et des discours impensables il y a encore trois semaines de cela émergent dans l’espace politique intérieur russe, qui sort de sa léthargie. 

Tout d’abord, il est reconnu dans le discours politico-médiatique russe que la situation ne pourra pas revenir à ce qui était avant le déclenchement de l’opération militaire.

Ensuite, l’on a vu un changement significatif dans l’espace médiatique. La première chaîne fédérale a été la plus touchée, même si elle n’est pas la seule à revoir sa programmation, mais c’est elle qui comptait le plus de « stars » flirtant désormais sur le mode « no war » et dont une bonne partie a courageusement pris la fuite avec leur compte en banque. Les programmes sont en cours de remodelage et l’on voit revenir des grands films soviétiques de qualité, disparaître des émissions vulgaires, bref un certain assainissement – indispensable – de l’espace télévisuel, qui s’était très fortement dégradé ces dernières années. Les réseaux sociaux voient un accès compliqué, notamment Tik Tok, qui pourtant lors de la gloire éphémère, mais Ô combien destructrice, de la folie covidienne, avait été envisagé comme une plateforme scolaire en Russie.

Par ailleurs, la Russie sort du Conseil de l’Europe et donc de la sacro-sainte CEDH, qui avait pour but avoué, l’introduction de toutes les « valeurs » et dogmes du monde global. Un projet de résolution visant à la sortie de la Russie de l’OMC a été déposé.

Sur le plan scientifique et scolaire, enfin le système de Bologne est remis en cause dans le discours et même le ministère de la Recherche a hier annoncé  un moratoire sur l’exigence des publications scientifiques dans les bases américains Scopus et Web of science, pour renforcer les publications dans les revues nationales et les recherches, qui correspondent à l’intérêt du pays.

Quelle belle victoire déjà ! Les élites politiques russes, qui défendaient la globalisation, commencent à se souvenir de l’intérêt de la Russie, un intérêt qui lui est propre, comme à chaque pays, et qui se différencie obligatoirement de l’intérêt global.

Source : Russie politics
http://russiepolitics.blogspot.com/…

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