Le Président Joe Biden s’adresse au personnel de l’US Air Force à la RAF Mildenhall
dans le Suffolk, 2021. (Joe Giddens / PA Wire via Getty Images)

Par Stephen Semler

Joe Biden a signé un budget de la défense record, alors même que son programme national est à la traîne. Nous avons droit à toutes les dépenses du Pentagone et à tous les coups de sabre contre la Chine, mais à aucun des programmes sociaux censés transformer la société.

Source : Jacobin Mag, Stephen Semler
Traduit par les lecteurs du site Les-Crises

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Cette semaine, Joe Biden a promulgué son premier budget militaire – le National Defense Authorization Act for Fiscal Year 2022 – qui augmente les dépenses de « défense » plus que même sous Donald Trump. La facture de 778 milliards de dollars du projet de loi confirme que Biden a l’intention de poursuivre le même schéma de « nouvelle Guerre froide » que l’administration précédente.

Dans sa stratégie de défense nationale de 2018, le département de la Défense de Trump a promu l’idée que les États-Unis sont enfermés dans une course aux armements avec la Chine et la Russie, affirmant que « le moyen le plus sûr de prévenir la guerre est d’être prêt à en gagner une. » Pour atteindre cet objectif stratégique mal défini, des figures centrales de l’establishment de la politique étrangère ont recommandé de gonfler le budget militaire de 3 à 5 % par an.

Le budget du Pentagone présenté par Biden répond à cette demande. À cet égard au moins, c’est comme si Trump n’avait jamais quitté ses fonctions.

La différence entre la course aux armements de Trump et celle de Biden était censée être que cette dernière entraînerait une hausse proportionnelle des dépenses sociales. Biden a fait campagne sur des dépenses de 7000 milliards de dollars sur une décennie – soit 700 milliards de dollars par an, en moyenne – pour les infrastructures civiles, les transports, le climat, les soins de santé, l’éducation et d’autres programmes sociaux.

Une fois en poste, le plan de Biden était de battre le rappel contre la Chine, déclenchant un effet de rassemblement autour du drapeau qui convaincrait le Congrès – y compris les conservateurs – de budgétiser à la fois l’économie et la compétition militaire. Comme l’a déclaré un assistant démocrate du Congrès à Vox, au cours des premiers mois de la présidence Biden, « la meilleure façon de mettre en œuvre un programme progressiste est d’utiliser la Chine [comme] une menace. »

L’administration Biden a fait de son mieux pour mettre cette théorie en action. Lorsque Biden a présenté son projet de loi sur les infrastructures en mars, il a davantage évoqué la Chine que le climat. Plus récemment, le porte-parole de la Maison Blanche, Andrew Bates, a décrit la loi « Build Back Better » comme un élément essentiel de la concurrence entre les États-Unis et la Chine, avertissant que « la Chine nous dépasse » dans des investissements tels que la pré-maternelle. Le projet de loi, a déclaré Bates, « constituerait l’un des meilleurs investissements dans la compétitivité américaine, l’un de ceux qui changent le plus la vie. »

Mais l’expérience du « guerrier froid » Biden a échoué. Alors que les dépenses militaires augmentent comme prévu – le budget de Biden alloue près de 40 milliards de dollars de plus que l’administration Trump, 170 milliards de dollars de plus que le dernier budget d’Obama et 5 % de plus que ce qu’il avait annoncé lors de sa campagne – moins de 8 % des fonds que Biden cherchait à obtenir pour son programme national ont été versés.

Sur la base d’une moyenne annuelle, Biden n’a fourni que 55 des 700 milliards de dollars qu’il avait promis pour les infrastructures humaines et physiques pour l’année fiscale 2022. Le projet de loi sur les infrastructures a été adopté, mais seulement après avoir été amputé de plus des trois quarts. La loi Build Back Better a été coupée en deux pour pouvoir être adoptée par le Congrès, mais elle a été mise en suspens faute de soutien. Biden n’a réussi à convaincre aucun Républicain – ni même certains membres de son propre parti – de la soutenir.

Dans sa déclaration d’opposition à Build Back Better, le sénateur Joe Manchin (D-WV) a renversé le scénario de Biden en citant la concurrence avec la Chine comme raison de s’opposer au projet de loi. Manchin a déclaré que cela entraverait la capacité des États-Unis à répondre à « l’incertitude géopolitique croissante alors que les tensions augmentent avec la Russie et la Chine. »

La guerre des nerfs contre la Chine à des fins de politique intérieure était une idée abominable dès le départ. Mais le fait qu’elle n’ait même pas fonctionné devrait inciter les progressistes du Congrès à s’opposer à la posture de Guerre froide à la Biden. À sa place, les progressistes devraient proposer une alternative qui comble le fossé entre les dépenses militaires et non militaires – et qui indique clairement laquelle des deux catégories peut réellement assurer la « sécurité. »

Au sujet de l’auteur

Stephen Semler est cofondateur du Security Policy Reform Institute, un groupe de réflexion sur la politique étrangère américaine financé par la base.

Source : Jacobin Mag, Stephen Semler, 30-12-2021
Traduit par les lecteurs du site Les-Crises

Source : Les Crises
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